Introduction à la philosophie critique d'Emmanuel Kant | ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
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R : Raison (Vernunft) : La raison est le pouvoir qui nous fournit les principes de la connaissance a priori. Aussi la raison pure est celle qui contient les principes qui servent à connaître quelque chose absolument a priori (Critique de la raison pure, Intro 1°ed., p46).
La raison est entièrement dialectique quand elle tente d'établir quelque chose a priori, touchant à des objets, et quand elle tente d'étendre la connaissance au-delà des limites de l'expérience possible (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Analytique transcendantale, Livre II, p148).
"Elle [la raison] doit plutôt être comparée à une sphère dont le rayon peut être trouvé par la courbe de l'arc à sa surface (par la nature des propositions synthétiques a priori) et dont le contenu et les limites peuvent être déterminés par là avec certitude. En dehors de cette sphère (le champs de l'expérience), il n'y a plus d'objets (object) pour elle, et même les questions concernant ces prétendus objets ne se rapportent qu'à des principes subjectifs d'une détermination universelle des rapports qui peuvent se présenter, dans les limites de cette sphère, entre les concepts de l'entendement" (Critique de la raison pure, Théorie transcendantale de la méthode, Discipline de la raison pure, Sec 2, p520). usage spéculatif-champs de l'expérience-idées-expérience la raison usage pratique-idées-fins suprêmes
"J'entends ici par raison tout le pouvoir supérieur de connaître et j'oppose, par conséquent, le rationnel à l'empirique" (Critique de la raison pure, Théorie transcendantale de la méthode, Architectonique de la raison pure, p560).
La raison pure ne contient que des principes régulateurs qui prescrivent une plus grande unité que celle que peut atteindre l'usage empirique de l'entendement, mais qui portent au plus haut degré, grâce à l'unité systématique, l'accord de cet usage avec lui-même (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Dialectique transcendantale, Livre II, Ch 3, But de la Dialectique naturelle, p484). En effet, la majeur donne toujours un concept qui fait que tout ce qui est subsumé sous la condition de ce concept est connu grâce à lui suivant un principe. Or, comme toute connaissance universelle peut servir de majeure dans un raisonnement de raison et que l'entendement fournit a priori de semblables propositions universelles, ces propositions peuvent donc recevoir aussi le nom de principes, en considération de l'usage qui en est possible (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Dialectique transcendantale, Intro II A, p255). Des principes de l'entendement pur : En eux-mêmes et dans leur origine, ces principes de l'entendement pur ne sont rien moins que des connaissances par concepts. En effet ils ne seraient pas mêmes possibles a priori, si nous n'y introduisions l'intuition pure (comme dans la mathématique) ou les conditions d'une expérience possible en général. L'entendement ne saurait donc nous procurer de connaissances synthétiques par concepts, et ce sont précisément ces connaissances que l'on nomme absolument des principes, bien que toutes les propositions universelles en général puissent être appelées relativement des principes. Ainsi la connaissance par principe est absolument autre chose que la simple connaissance de l'entendement, car celle-ci, bien que pouvant procéder d'autres connaissances dans la forme d'un principe, ne repose pas en elle-même (en tant qu'elle est synthétique) sur la simple pensée et ne renferme pas quelque chose d'universel par concepts :
L'entendement est le pouvoir de ramener les phénomènes à l'unité au moyen des règles (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Dialectique transcendantale, Intro II A, p256). On souhaite depuis longtemps de pouvoir découvrir à la place de l'infinie variété des lois civiles, les principes de ces lois ; car c'est en cela seulement que peut consister le secret de simplifier la législation. Ces lois ne font qu'imposer à notre liberté des conditions restrictives qui la font s'accorder entièrement avec elle-même ; elles se rapportent donc à quelque chose qui est tout à fait notre propre ouvrage et dont nous nous-mêmes être les auteurs par les concepts que nous en avons [la notion de respect?] (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Dialectique transcendantale, Intro II A, p256). Il y a dans tout raisonnement une proposition qui joue le rôle de principe, et une autre, qui en est tirée, à savoir la conclusion, et enfin la déduction selon laquelle la vérité de la seconde est indissolublement liée à la vérité de la première. Du raisonnement de l'entendement : C'est lorsque le jugement inféré est déjà contenu dans le premier, de telle sorte qu'il en puisse être tiré sans l'intermédiaire d'une troisième représentation, la conséquence se nomme immédiate (consequentia immediata). Du raisonnement de la raison : C'est lorsque, outre la connaissance qui sert de fondement, il est encore besoin d'un autre jugement pour opérer la conclusion. Dans la démarche de la raison, il faut :
1. concevoir une règle (major) par l'entendement ; 2. subsumer une connaissance à la condition de la règle (minor), au moyen de la faculté de jugement ; 3. déterminer ma connaissance par le prédicat de la règle (conclusio) et, par conséquent, a priori par la raison.
Le rapport que représente la majeure, comme règle, entre une connaissance et sa condition, constitue-t-il les diverses espèces d'inférences rationnelles. Il y a donc, comme autant de jugement, trois sortes de raisonnements de raison, à savoir les catégoriques, les hypothétiques et les disjonctifs. Si la conclusion, comme jugement, est donné, pour voir si ce jugement ne découle pas de jugements déjà donnés et par lesquels un tout autre objet est conçu, il faut chercher dans l'entendement l'assertion de cette conclusion, afin de voir si elle ne se trouve pas d'avance dans l'entendement, sous cette condition, d'après une règle générale. Or si je découvre une condition de ce genre et si l'objet de la conclusion se laisse subsumer sous la condition de ce genre et si l'objet de la conclusion est alors tirée de la règle qui s'applique aussi à d'autres objets de la connaissance. Ainsi la raison cherche dans le raisonnement à ramener à un très petit nombre de principes (de conditions générales) la grande variété des connaissances de l'entendement et à y opérer ainsi la plus grande la plus haute (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Dialectique transcendantale, Intro II B, p258). Fondement du principe transcendantal de la raison dans la connaissance synthétique par raison pure : Le procédé formel et logique de la raison dans l'inférence rationnelle nous fournit déjà une indication pour le trouver :
A. L'unité intellectuelle de la raison :
1. La raison, dans ses raisonnement, ne s'applique pas à des intuitions pour les soumettre à des règles (comme le fait l'entendement avec ses catégories), mais au contraire, à des concepts et à des jugements ; 2. si la raison se rapporte aux objets, ce n'est seulement qu'avec l'entendement et ses jugements, qui s'appliquent immédiatement aux sens et à leur intuition pour en déterminer l'objet ; 3. l'unité rationnelle n'est donc pas l'unité d'une expérience possible, car cette dernière est l'unité intellectuelle.
B. La condition générale du jugement de la raison dans son usage logique :
1. La raison cherche, dans son usage logique, la condition générale de son jugement (de la conclusion) et le raisonnement n'est lui-même autre chose qu'un jugement que nous formons en subsumant sa condition à une règle générale (la majeure) ; 2. cette règle est soumise à la même recherche de la raison et qu'il faut ainsi chercher (au moyen d'un prosyllogisme) la condition de la condition ; 3. le principe de la raison en générale (dans son usage logique) est de trouver la connaissance conditionnée de l'entendement, l'inconditionné qui en achèvera l'unité.
Mais cette maxime logique ne peut être un principe de la raison pure qu'à la condition qu'on admette que si le conditionné est donné, soit aussi donnée (c'est-à-dire contenue dans l'objet et dans sa liaison) toute la série des conditions subordonnées, série qui, par suite, elle-même, est inconditionnée.
1. Un tel principe de la raison pure est manifestement synthétique ; car le conditionné se rapporte sans doute analytiquement à quelque condition, mais non pas à l'inconditionné ; 2. l'inconditionné peut être examiné en particulier dans toutes les déterminations qui le distinguent de tout inconditionné et doit par conséquent, donner matière à maintes propositions synthétiques a priori ; 3. les propositions fondamentales qui dérivent de ce principe suprême de la raison purée seront transcendantes par rapport à tous les phénomènes, c'est-à-dire que l'on ne pourra jamais faire de ce principe un usage empirique qui lui soit adéquat.
C. L'objet de la dialectique transcendantale :
Rechercher si ce principe (la série des conditions s'élevant à l'inconditionné) a ou n'a pas de valeur objective, et quelles conséquences en dérivent pour l'usage empirique de l'entendement, ou plutôt, s'il n'y a absolument aucun principe rationnel de ce genre doué de valeur objective, mais au contraire, une prescription simplement logique qui nous pousse à nous rapprocher de l'intégralité de ces conditions et à porter ainsi dans notre connaissance la plus haute unité rationnelle possible pour nous, c'est rechercher si ce besoin de la raison, par suite d'un malentendu, a été pris pour un principe transcendantal de la raison pure postulant témérairement cette intégralité absolue de la série des conditions dans les objets eux-mêmes, et c'est se demander quelles sont les erreurs et les illusions qui peuvent se glisser dans les raisonnements dont la majeure est tirée de la raison pure. Cette dialectique transcendantale se divisera en deux parties principales dont la première traitera des concepts transcendants de la raison pure et la seconde de ses raisonnements transcendants et dialectiques (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Dialectique transcendantale, Intro II C, p260). Fonction de la raison dans ses inférences : Elle consiste dans l'universalité de la connaissance par concept, et le raisonnement lui-même est un jugement a priori dans toute l'étendue de sa condition :
Ex : Caïus est mortel.
On pourrait tirer cette proposition de l'expérience par l'entendement, mais :
1. je cherche un concept qui renferme la condition sous laquelle est donné le prédicat (assertion en général) de ce jugement (le concept d'homme) ; 2. je subsume sous cette condition prise dans toute son extension (tous les hommes sont mortels) ; 3. je détermine en conséquence la connaissance de mon objet (Caïus est mortel).
Dans la conclusion d'un syllogisme, nous restreignons le prédicat à un objet, après l'avoir pensé auparavant, dans la majeure, dans toute son extension, or :
1. L'universalité (universalitas) est cette quantité absolue de l'extension sous une certaine condition ; 2. à l'universalité correspond, dans la synthèse de l'intuition, la totalité (universitas) des conditions ; 3. le concept rationnel transcendantal n'est autre chose que le concept de la totalité des conditions pour un conditionné donné.
Comme l'inconditionné seul rend possible la totalité des conditions, et qu'inversement la totalité des conditions est toujours elle-même inconditionnée, un concept rationnel pur en général peut être défini par le concept de l'inconditionné, en tant qu'il contient le principe de la synthèse du conditionné (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Dialectique transcendantale, Livre I, Sec 2, p267). La raison pure abandonne tout ce qui à l'entendement se rapporte immédiatement aux objets de l'intuition ou plutôt à leur synthèse dans l'imagination. Ainsi la raison de se rapporte qu'à l'usage de l'entendement, non pas en tant qu'il contient le principe d'une expérience possible (car la totalité absolue des conditions n’est pas un concept utilisable dans une expérience, parce qu'aucune expérience n'est inconditionnée), mais pour lui prescrire une direction vers une certaine unité dont l'entendement n'a aucun concept, mais qui tend à rassembler dans un tout absolu tous les actes de l'entendement par rapport à chaque objet. Aussi l'usage objectif des concepts purs de la raison est-il toujours transcendant, tandis que l'usage des concepts purs de l'entendement, d'après sa nature, doit toujours être immanent, puisqu'il se borne simplement à l'expérience possible (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Dialectique transcendantale, Livre I, Sec 2, p269). Comme il ne s'agit dans l'usage pratique de l'entendement, que d'une exécution d'après des règles, l'idée de la raison pratique peut toujours être donné réellement, bien qu'en partie, in concreto, et même elle est la condition indispensable de l'usage pratique de la raison. L'exécution de cette idée est toujours bornée et défectueuse mais en des limites déterminables, et par conséquent, elle est toujours sous l'influence du concept d'une perfection absolue. L'idée pratique est donc toujours grandement féconde et indispensablement nécessaire par rapport aux actions réelles. La raison pure y puise même la causalité nécessaire pour produire réellement ce que renferme son concept ; c'est pourquoi on ne peut pas dire de la sagesse qu'elle n'est qu'une idée, mais au contraire, par là-même qu'elle est l'idée de l'unité nécessaire de toutes les fins possibles, elle doit servir de règle à toute pratique, en qualité de condition originaire et tout au moins restrictive (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Dialectique transcendantale, Livre I, Sec 2, p270). Du rapport de la raison à la forme logique de la connaissance : Il nous faut, comme dans la déduction des catégories, examiner la forme logique de la connaissance rationnelle et voir si la raison n'est pas aussi par là une source de concepts qui nous font regarder des objets en eux-mêmes, comme synthétiquement déterminés a priori par rapport à telle ou telle fonction de la raison. La raison, considérée comme le pouvoir d'une certaine forme logique de la connaissance, est le pouvoir de conclure, c'est-à-dire de juger médiatement (en subsumant la condition d'un jugement possible sous la condition d'un jugement donné) :
1. Le jugement donné est la règle générale (majeure, major) ; 2. la subsomption de la condition d'un autre jugement possible sous la condition de la règle est la mineure (minor) ; 3. le jugement réel qui proclame l'assertion de la règle dans le cas subsumé est la conclusion (conclusio) ; 4. la règle exprime quelque chose de général sous une certaine condition et la condition de la règle se trouve dans un cas donné, donc ce qui est valable universellement sous cette condition doit aussi être regardé comme valable dans le cas donné (qui renferme cette condition).
Et ainsi la raison arrive à une connaissance au moyen d'actes de l'entendement qui constituent une série de conditions. En effet, dans toute série dont l'exposant est donné (celui des jugements catégoriques ou hypothétiques) peut être poursuivie, et par suite le même procédé de la raison conduit à la ratiocinatio prosyllogistice, qui est une série de raisonnement qui peut être poursuivie indéfiniment, soit du côté des conditions (par prosyllogismos), soit du côté du conditionné (per episyllogismos). Soit donc que, du côté des conditions, la série des prémisses ait un point de départ comme condition suprême, soit qu'elle n'en ait pas et que, par conséquent, elle soit sans limites a parte priori, elle doit cependant renfermer toujours la totalité de la condition et cela même si on ne peut l'atteindre, il faut que la série entière soit absolument vraie, pour que le conditionné, qui en est regardé comme une conséquence, puisse être tenu pour vrai (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Dialectique transcendantale, Livre I, Sec 2, p273). Différentes sortes de raisonnements dialectiques sur la réalité transcendantales des idées : Le fait qu'il n'y ait aucun objet (object) correspondant à une idée nous conduit à penser que la réalité transcendantale (subjective) des concepts purs de la raison se fonde sur un raisonnement nécessaire. Il y a donc des raisonnement qui ne contiennent pas de prémisses empiriques et au moyen desquels nous concluons de quelque chose que nous connaissons à quelque autre chose dont nous n'avons aucun concept et à quoi nous attribuons tout de même de la réalité objective, par une inévitable apparence. De tel raisonnements méritent plutôt, par rapport à leur résultat, le nom de sophisme que celui de raisonnements mais ce sont des sophistications, non pas de l'homme, mais de la raison pure. Il y a trois sortes de raisonnements dialectiques correspondant à autant d'idées auxquelles aboutissent leurs conclusions :
1. Le paralogisme transcendantal par lequel je conclus du concept transcendantal du sujet, qui ne renferme aucun divers, à l'unité absolue de ce sujet lui-même, dont je n'ai, de cette manière, absolument aucun concept ; 2. l'antinomie de la raison pure sur laquelle repose le concept transcendantal de la totalité absolue de la série des conditions pour un phénomène donné en général et de ce que j'ai toujours un concept en soi contradictoire de l'unité synthétique inconditionnée d'un côté de la série, je conclus à la légitimité de l'unité du côté opposé, dont je n'ai cependant même pas un concept ;
3. l'idéal de la raison pure par lequel je conclus de la totalité des conditions nécessaires pour concevoir des objets en général, en tant qu'ils peuvent nous être donnés, à l'unité synthétique absolue de toutes les conditions de la possibilité des choses en général, c'est-à-dire de choses, que je ne connais pas d'après leur simple concept transcendantal, à un être de tous les êtres que je connais encore moins par un concept transcendant et de la nécessité inconditionnée duquel je ne puis me former aucun concept (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Dialectique transcendantale, Livre II, p278). Les inférences dialectiques sont les fondements de l'apparence transcendantale dont la logique donne le schème dans les trois espèces formelles de raisonnement en général à peu près comme les catégories trouvent leur schème logique dans les quatre fonctions de tout les jugements :
1. La première espèce de ces raisonnements sophistiques tend à l'unité inconditionnée des conditions subjectives de toutes les représentations en général (du sujet ou de l'âme), en correspondance avec les raisonnements catégoriques dont la majeure énonce, à titre de principe, le rapport d'un prédicat à un sujet ;
2. la deuxième espèce d'arguments dialectique a pour contenu, par analogie avec les raisonnements hypothétiques, l'unité inconditionnée des conditions objectives dans le phénomène ;
3. la troisième espèce a pour thème l'unité inconditionnée des conditions objectives de la possibilité des objets en général (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Dialectique transcendantale, Livre II, ch 2, Sec 1, p327). Remarque sur les raisonnements dialectiques : Sur le paralogisme transcendantal : Le paralogisme transcendantal n'a produit qu'une apparence partielle par rapport à l'idée du sujet de notre pensée et que l'assertion du contraire ne reçoit pas la moindre apparence tirée de concepts rationnels. L'avantage est entièrement du côté du pneumatisme, bien que cette doctrine ne puisse désavouer le vice originel qui fait qu'en dépit de toute l'apparence qui lui est favorable, elle s'en va toute en fumée dans le creuset de la Critique (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Dialectique transcendantale, Livre II, ch 2, Sec 1, p327). Sur l'antinomie de la raison pure : Quand nous appliquons la raison à la synthèse objective des phénomènes, elle croit, avec beaucoup d'apparence, y rendre valable son principe de l'unité inconditionnée, mais elle s'embrouille bientôt dans de telle contradictions qu'elle est forcée de renoncer à ces prétentions en matières cosmologiques (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Dialectique transcendantale, Livre II, ch 2, Sec 1, p327). Apparence dialectique de la raison pure : Elle concerne la généralité des conditions de la pensée et il ne peut y avoir que trois cas de l'usage dialectique de la raison pure : 1. La synthèse des conditions d'une pensée en général ; 2. la synthèse des conditions de la pensée empirique ; 3. la synthèse des conditions de la pensée pure.
Dans ces trois cas la raison pure s'occupe simplement de la totalité absolue de cette synthèse, c'est-à-dire de la condition qui est elle-même inconditionnée. Sur cette division se fonde aussi la triple apparence transcendantale qui donne lieu aux trois sections de la dialectique et qui fournit l'idée d'autant de sciences apparentes tirées de la raison pure, psychologie, cosmologie et théologie transcendantales (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Dialectique transcendantale, Livre II, Ch 1, p320 1°édition). Principe régulateur de la raison : Le principe de la raison est une règle qui, dans la série des conditions des phénomènes donnés, commande une régression à laquelle il n'est jamais permis de s'arrêter dans l'absolument inconditionné, autrement dit c'est un principe de la raison qui postule comme règle ce que nous devons faire dans la régression et n'anticipe pas ce qui est donné en soi dans l'objet (object) avant toute régression (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Dialectique transcendantale, Livre II, Ch 2, Sec 8, p382). De la détermination du principe régulateur : Pour déterminer le sens de cette règle de la raison pure, il faut remarquer qu'elle ne peut pas dire ce qu'est cet objet (object), mais comment il faut disposer la régression empirique pour arriver au concept complet de l'objet. En ce sens c'est un principe qui permet de poursuivre et d'élargir l'expérience le plus possible et d'après lequel aucune limite empirique ne peut avoir la valeur d'une limite absolue (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Dialectique transcendantale, Livre II, Ch 2, Sec 8, p382). Si l'on peut justifier le sens subjectif de ce principe qui consisterait à déterminer l'usage de l'entendement le plus grand possible dans l'expérience, conformément aux objets de cette expérience, c'est précisément comme si, en tant qu'axiomes (ce qui est impossible par la raison), il déterminerait a priori les objets en eux-mêmes, car un axiome ne pourrait pas, relativement aux objets (objecte) de l'expérience, exercer une plus grande influence sur l'extension et la rectification de notre connaissance que celle d'appliquer son activité dans l'usage empirique le plus étendu de notre entendement (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Dialectique transcendantale, Livre II, Ch 2, Sec 9, p386). Le fondement du principe régulateur de la raison est cette proposition que dans la régression empirique, on ne peut trouver aucune expérience d'une limite absolue, par conséquent, d'aucune condition qui, comme telle, soit, au point de vue empirique, absolument inconditionnés. les impératifs sont les représentations de la causalité de la raison que nous imposons comme règles, dans tous l'ordre pratique (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Dialectique transcendantale, Livre II, Ch 2, Sec 9.III, p402). Le devoir exprime une espèce de nécessité et de liaison avec des principes, qui ne se représente pas ailleurs dans toute la nature, en ce sens le devoir, quand on a simplement devant les yeux le cours de la nature, n'a plus du tout de signification : nous ne pouvons pas demander pas plus demander ce qui doit arriver dans la nature que demander quelle propriété un cercle doit avoir, mais nous pouvons demander ce qui arrive dans la nature ou quelles sont les propriétés du cercle. Ce devoir exprime une action possible dont le principe n'est autre qu'un simple concept, tandis que le principe d'une simple action naturelle doit toujours être un phénomène (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Dialectique transcendantale, Livre II, Ch 2, Sec 9.III, p402). De la causalité de la raison par rapport aux phénomènes : Si la raison a réellement de la causalité par rapport aux phénomènes, il faut alors qu'elle montre un caractère empirique, parce que toute cause suppose une règle d'après laquelle certains phénomènes suivent, comme effets, et que toute règle exige une uniformité d'effets qui fonde le concept de la cause (comme d'un pouvoir) ; caractère que nous pouvons nommer, en tant qu'il doit sortir de simples phénomènes, son caractère empirique, qui est constant, tandis que les effets, suivant la diversité des conditions concomitantes et en partie limitatives, apparaissent sous des figures changeantes. Du caractère empirique de la volonté de l'homme ou de la causalité de la raison spéculative : Tout homme a donc un caractère empirique de sa volonté qui n'est autre chose qu'une certaine causalité de sa raison, en tant que celle-ci montre, dans ses effets, dans le phénomène, une règle d'après laquelle on peut conclure les motifs rationnels et leurs actions quant à leur mode et quant à leur degrés, et juger les principes subjectifs de la volonté. En tant que ce caractère empirique doit être, comme effet, tiré des phénomènes et de leurs règles que nous fournit l'expérience, toutes les actions de l'homme dans le phénomènes sont déterminés suivant l'ordre de la nature par son caractère empirique et par les autres causes concomitantes. Ainsi, au point de vue de ce caractère empirique, il n'y a pas de liberté, mais c'est par ce point de vue que nous pouvons uniquement observer, et, comme cela se fait dans l'anthropologie, scruter physiologiquement les causes déterminantes de ses actes. Du caractère intelligible de la volonté de l'homme ou de la causalité pratique de la raison : Si nous examinons ces mêmes actions au point de vue de la raison, et non pas de la raison spéculative pour lui en demander d'en expliquer l'origine, mais uniquement dans la mesure où la raison est la cause capable de les produire, en un mot, si nous les rapprochons de la raison au point de vue pratique, nous trouvons une tout autre règle et un ordre tout différent de ce qui est de l'ordre de la nature. Alors peut-être ce qui est pourtant arrivé suivant le cours de la nature et ce qu'il était inévitable qu'il arrive d'après ses principes empiriques, ne devait-il pas arriver (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Dialectique transcendantale, Livre II, Ch 2, Sec 9.III, p403). De l'influence des idées dans la causalité des actions : Parfois les idées de la raison ont réellement fait preuve de causalité par rapport aux actions de l'homme considérées comme phénomènes et qu'elles sont arrivées parce qu'elles étaient déterminées par les principes de la raison. 1.1 si la raison a de la causalité par rapport aux phénomènes, son action peut-elle être appelée libre lorsqu'elle est très exactement déterminée et nécessaire dans son caractère empirique? 1.2 or le caractère empirique est à son tour déterminé dans le caractère intelligible (dans la manière de penser) ; que nous ne connaissons pas mais que nous désignons par des phénomènes qui nous font connaître immédiatement que la manière de sentir (le caractère empirique) ; 1.3 donc l'action attribuée au mode de penser ne résulte pas des lois empiriques, mais de telle sorte que les conditions pures soient antérieures et que c'est seulement ses effets dans le phénomène du sens interne qui précèdent. 2.1 Si la raison peut avoir de la causalité par rapport aux phénomènes, c'est qu'elle a un pouvoir par lequel commence tout d'abord la condition sensible d'une série empirique d'effets ; 2.2 en effet, la condition qui réside dans la raison n'est pas sensible, et, donc ne commence pas elle-même ; 2.3 donc nous trouvons ici ce que nous sachions en vain dans toutes les séries empiriques, à savoir : la condition d'une série successive d'événements qui est elle-même empiriquement inconditionnée car la condition est ici en dehors de la série des phénomènes (dans l'intelligible) et, par suite, elle n'est soumise à aucune condition sensible et à aucune détermination de temps par une cause antérieure ; 3. La raison est donc la condition permanente de tous les actes volontaires par lesquels l'homme se manifeste ; 3.1 chacun de ces actes est déterminé dans le caractère empirique de l'homme avant même d'arriver ; 3.2 or au point de vue du caractère intelligible, il n'y a ni avant, ni après, et toute action est l'effet immédiat du caractère intelligible de la raison pure qui agit librement sans être déterminée dynamiquement dans la chaîne des causes naturelles par des principes externes ou internes, mais qui la précèdent dans le temps (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Dialectique transcendantale, Livre II, Ch 2, Sec 9.III, p405). Du principe régulateur de la raison pour le monde de la sensibilité : Le principe régulateur de la raison est que tout le monde sensible a une existence empiriquement conditionnée et qu'il n'y a nulle part en lui, par rapport à aucune propriété, une nécessité inconditionné, qu'il n'existe aucune membre de la série des conditions dont on ne doive attendre toujours et rechercher aussi loin qu'on le peut la condition empirique dans une expérience possible, et que rien ne nous autorise à dériver une existence quelconque d'une condition placée en de hors de la série empirique, ou la tenir, dans la série même, pour absolument indépendante et subsistante par elle-même, sans pour cela nier que toute la série puisse être fondée sur quelque être intelligible (qui par là est libre de toute condition empirique et, qui plus est renferme le principe de la possibilité de tous les phénomènes) (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Dialectique transcendantale, Livre II, Ch 2, Sec 9.IV, p409). Marche de la raison naturelle : La marche de la raison naturelle est de commencer par l'expérience commune, c'est-à-dire qu'elle prend pour fondement quelque chose d'existant, et non par les concepts. Mais ce fondement s'écroule quand il ne repose pas sur le roc immobile de l'absolument nécessaire, or ce dernier à son tour reste lui-même suspendu sans appui, s'il y a encore, en dehors de lui et sous lui, un espace vide et s'il ne remplit pas tout lui-même, d'où il résulte qu'il ne laisse plus aucune place au pourquoi, et qu'il a une réalité infinie (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Dialectique transcendantale, Livre II, Ch 3, Sec 3, p421). Différents usages de la raison : Lorsqu'une chose est ou doit être de manière conditionnelle alors, ou bien une certaine condition déterminée peut être pour cela absolument nécessaire, ou bien elle peut être supposée comme arbitraire et contingente, dans le premier cas, la condition est postulée (per thesin) et dans le second cas, elle est supposée (per hypothesin) (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Dialectique transcendantale, Livre II, Ch 3, Sec 7, p448). De l'usage théorique de la raison : L'usage théorique de la raison est celui par lequel je connais a priori (comme nécessaire) que quelque chose est. Des objets de la raison théorique en relation avec l'Etre suprême : Puisque, quand il est simplement question de ce qui est, le conditionné, qui nous est donné dans l'expérience, est toujours conçu comme contingent, la condition qui lui est propre ne peut donc pas être connue par là même comme absolument nécessaire, et elle ne sert, au contraire, que comme supposition relativement nécessaire ou plutôt comme une hypothèse indispensable pour la connaissance rationnelle du conditionné, mais qui, en soi et a priori, est arbitraire. Si donc la nécessité absolue d'une chose doit être connue dans la connaissance théorique, cela ne pourrait arriver que par des concepts a priori, mais jamais comme celle d'une cause, par rapport à une existence donnée par l'expérience. De l'usage pratique de la raison : L'usage pratique est celui qui me fait connaître a priori ce que je dois faire. Des objets de la raison pratique en relation avec l'Etre suprême : En tant que les lois pratiques sont absolument nécessaires (les lois morales), si ces lois supposent nécessairement quelque existence comme condition de la possibilité de leur force obligatoire, il faut que cette existence soit postulée, parce qu'en effet le conditionné, dont part le raisonnement pour aboutir à cette condition déterminée, est lui-même connu a priori comme absolument nécessaire. Mais les lois morales ne supposent pas seulement l'existence d'un Etre suprême, mais qu'encore, comme elles sont absolument nécessaires à un autre point de vue, elles la postulent à juste titre postulat seulement pratique, pour le moment, nous laisserons encore de côté ce genre de raisonnement. Du rapport de la raison à l'entendement ou de l’usage empirique de la raison : La raison ne rapporte jamais directement à un objet, mais simplement à l'entendement et, par le moyen de celui-ci, à son propre usage empirique, elle ne crée donc pas de concepts d'objets, mais elle se borne à les ordonner et elle fournit l'unité qu'ils peuvent avoir dans leur plus grande extension possible, c'est-à-dire par rapport à la totalité de séries, totalité que n'a jamais en vue l'entendement, qui ne s 'occupe que de l'enchaînement par lequel des séries de conditions sont partout constituées suivant des concepts. La raison n'a donc proprement pour objet que l'entendement et son emploi conforme à une fin, et, de même celle-là, de son côté, relie par des idées le divers des concepts, en proposant une certaine unité collective pour but aux actes de l'entendement qui, sans cela, n'aurait à s'occuper que de l'unité distributrice (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Dialectique transcendantale, Livre , Ch II, Appendice, p453). De l'usage apodictique de la raison : C'est lorsque, en tant que la raison est le pouvoir de dériver le particulier du général, le général est déjà certain en soi et donné et alors il n'exige que du jugement pour opérer la subsomption, et le particulier est nécessairement déterminé par là (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Dialectique transcendantale, Livre II, Ch 3, Appendice, p455). De l'usage hypothétique de la raison : C'est lorsque, en tant que la raison est le pouvoir de dériver le particulier du général, le général n'est admis que d'une manière problématique et il n'est qu'une simple idée, le particulier est certain, mais la généralité de la règle relative à cette conséquence est encore un problème, on rapproche alors de la règle plusieurs cas particuliers, qui, tous, sont certains, afin de voir s'ils en découlent, et dans ce cas, s'il y a apparence que tous les cas particuliers qu'on peut en donner en découlent, on conclut à l'universalité de la règle et ensuite, de celle-ci, à tous les cas qui ne sont pas donnés en soi. De la limite de l'usage hypothétique : L'usage hypothétique de la raison, qui se fonde sur des idées admises comme concepts problématiques, n'est pas constitutifs, c'est-à-dire qu'il n'est pas de nature telle qu'à juger selon toute rigueur, on en puisse déduire la vérité de la règle générale prise comme hypothèse. De l'usage hypothétique de la raison comme usage régulateur : Ainsi, l'usage hypothétique de la raison est régulateur, c'est-à-dire qu'il sert à mettre, autant que possible, de l'unité dans les connaissances particulières et à rapprocher ainsi la règle de l'universalité. En ce sens cet usage de la raison a pour objet l'unité systématique des connaissances de l'entendement, et cette unité est la pierre de touche de la vérité des règles. Réciproquement, l'unité systématique (comme simple idée) n'est uniquement qu'une unité projetée que l'on doit regarder non pas comme donnée, mais comme problématique et qui sert à trouver un principe au divers et à l'usage particulier de l'entendement et, par là, à diriger ce dernier vers les cas qui ne sont pas donnée et à le faire s'accorder avec lui-même. Or, ce qu'on voit par là seulement c'est que l'unité systématique ou rationnelle des diverses connaissances de l'entendement est un principe logique qui sert, là où l'entendement ne peut arriver seul à établir des règles, à lui venir en aide au moyen d'idées et à procurer en même temps à la diversité de ses règles une unité fondée sur un principe (une unité systématique) et par là une liaison aussi étendue que possible. De l'extension de l'usage hypothétique de la raison à un usage transcendantal : Ce serait un principe transcendantal de la raison que de rendre l'unité systématique nécessaire non pas simplement d'une manière subjective et logique, comme méthode, mais encore objectivement, c'est-à-dire de pouvoir décider si la nature des objets, ou la nature de l'entendement qui les connaît comme tels, est destinée en soi à l'unité systématique et pouvoir, dans une certaine mesure, la postuler a priori et même abstraction faite d'un tel intérêt de la raison et dire, par conséquent, que toutes les connaissances possibles de l'entendement (y compris les connaissances empiriques) ont leur unité rationnelle et sont soumises à des principes communs d'où elles peuvent être dérivées malgré leur diversité (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Dialectique transcendantale, Livre II, Ch 7, Appendice, p455). De la force comme unité de la causalité d'une substance ou de l'idée d'une faculté fondamentale : Expliquons cela par un cas de l'usage de la raison : 1. Parmi les diverses espèces d'unité qui reposent sur les concepts de l'entendement se trouve aussi cette unité de la causalité d'une substance qu'on appelle force ; 1.1 les divers phénomènes d'une même substance montrent tant d'hétérogénéité que l'on doit admettre presque autant d'espèces de forces qu'il se présente d'effets, comme dans l'âme humaine, la sensation, la conscience, l'imagination, la mémoire, l'esprit, la faculté de discernement, le plaisir, le désir, etc. 1.2 or une maxime logique veut que l'on diminue cette diversité apparente, en découvrant, par comparaison, l'identité cachée et en cherchant à voir si l'imagination liée à la conscience n'est pas mémoire, esprit, discernement, peut être même entendement ou raison ; 1.3 donc l'idée d'une faculté fondamentale, dont la logique ne démontre pas d'ailleurs l'existence, est au moins le problème d'une représentation systématique de la diversité des facultés ; 1.31 le principe logique de la raison exige que cette unité soit, autant que possible, réalisée, en effet, plus les phénomènes de telle faculté et de telle autre sont trouvés identiques entre eux, plus il devient vraisemblable qu'ils ne sont rien de plus que des manifestations diverses d'une seule et même faculté, qui peut être appelée (comparativement) leur faculté fondamentale ; 2. or les forces comparativement première doivent à leur tour être comparées entre elles, afin qu'en découvrant leur harmonie, on les rapproche d'une force fondamentale unique et radicale, c'est-à-dire absolue ; 2.1 en tant que cette unité rationnelle est simplement hypothétique, on n'affirme pas qu'une telle force doit être trouvée en réalité, mais qu'on doit la chercher dans l'intérêt de la raison, c'est-à-dire afin de ramener à certains principes les diverses règles que l'expérience peut nous fournir, et qu'il faut, de cette manière, chercher à introduire une unité systématique ; 2.2 or, en faisant attention à l'usage transcendantal de l'entendement, on s'aperçoit que cette idée d'une force fondamentale en général n'est pas simplement déterminée comme un problème pour l'usage hypothétique, mais qu'elle présente une réalité objective qui postule l'unité systématique des diverses forces d'une substance et qui constitue un principe apodictique de la raison ; 2.3 donc, sans avoir encore cherché l'accord des diverses formes, nous supposons pourtant qu'il doit y avoir un tel accord car la raison suppose l'unité systématique de diverses formes dans des substances analogues jusqu'à un certain degré, comme dans la matière en général où les lois physiques particulières sont soumises à des lois générales et l'économie des principes n'est pas seulement un principe d'économie de la raison, mais encore une loi interne de la nature ; 3. Donc on ne peut savoir comment un principe logique de l'unité rationnelle des règles pourrait avoir lieu, si l'on ne supposait un principe transcendantal au moyen duquel une unité systématique de ce genre, en tant qu'inhérente aux objets eux-mêmes, est admise a priori comme nécessaire (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Dialectique transcendantale, Livre II, Ch 7, Appendice, p456-457). Usage régulareur de la raison pour l'entendement : Les trois principes logiques de la raison sont : 1. le principe (Princip) de l'homogénéité du divers sous des genres plus élevés ; 2. le principe (Grundsatz) de la variété de l'homogène sous des espèces inférieures ; 3. la loi de l'affinité de tous les concepts ou le principe de la continuité des formes, c'est-à-dire une loi qui ordonne de passer continuellement de chaque espèce à chaque autre par l'accroissement graduel de la diversité (p460).
La première loi empêche qu'on ne s'égare dans la variété des différents genres originaires et recommande l'homogénéité ; la seconde loi limite ce penchant à l'uniformité et ordonne que l'on distingue des sous-espèces avant de se tourner, avec son concept général, vers les individus ; la troisième réunit les deux précédentes en prescrivant l'homogénéité jusque dans la plus grande variété par le passage graduel d'une espèce à l'autre, ce qui indique une sorte de parenté entre différentes branches sortant toutes d'un même tronc (p462). Remarque sur le principe de la continuité des formes : Ce principe résulte de l'union que l'on établit entre les deux premiers lorsque, en s'élevant à des genres plus élevés, tout aussi bien qu'en descendant à des espèces inférieures, on a accompli dans l'idée l'enchaînement systématique, car alors, toutes les diversités sont apparentées les unes aux autres, parce qu'elles dérivent, toutes ensembles, d'un seul genre suprême, en passant par tous les degrés de la détermination étendue (p461). Mais cette loi logique du continuum specierum (formarum logicarum) présuppose une loi transcendantale, sans laquelle ce précepte ne ferait qu'induire en erreur l'usage de l'entendement. Cette loi doit donc reposer sur des principes purs transcendantaux et non sur des principes empiriques car c'est elle qui a produit ce qu'il y a de systématique dans la connaissance de la nature (p462). Ainsi cette continuité des formes est une simple idée à laquelle on ne saurait jamais indiquer dans l'expérience d'objet correspondant, non seulement parce que les espèces sont réellement divisées dans la nature et que, par conséquent, elles doivent former en soi un quantum discretum sinon il y aurait une véritable infinité de membres intermédiaires entre deux espèces données, ce qui est impossible, mais encore parce que nous ne pouvons faire de cette loi aucun usage empirique déterminé, puisqu'elle ne nous indique pas le moindre critérium de l'affinité qui nous serve à chercher la succession graduelle de leur diversité, en nous montrant jusqu'où il est possible d'arriver, et qu'elle se borne, au contraire, à nous donner une indication générale d'avoir à la chercher (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Dialectique transcendantale, Livre II, Ch 7, Appendice, p463). Ainsi les principes de la raison pure ne peuvent pas être constitutifs, même par rapport aux concepts empiriques, parce qu'aucun schème correspondant de la sensibilité ne peut leur être donné et qu'ainsi ils ne peuvent avoir aucun objet in concreto (p464). Des maximes de la raison spéculatives : Les maximes de la raison spéculative reposent uniquement sur l'intérêt spéculatif de cette raison, bien qu'à la vérité elles paraissent être des principes objectifs. Ainsi, si l'on considère les principes simplement régulateurs comme des principes constitutifs, ils peuvent être contradictoires, en tant que principes objectifs, mais si on les considère simplement comme des maximes, il n'y a plus de contradiction véritable, mais simplement un intérêt divers de la raison, et cet intérêt motive la divergence dans la manière de penser. En effet, la raison n'a qu'un intérêt, et le conflit de ses maximes n'est qu'une différence et une limitation réciproque des méthodes dont le but est de donner satisfaction à cet intérêt. Il y a donc deux points de vue possibles : 1. soit c'est l'intérêt de la diversité qui l'emporte (suivant le principe de la spécification) ; 2. soit c'est l'intérêt de l'unité (suivant le principe de l'agrégation) (p465). Chacun d'eux croit tirer son jugement de la vue de l'objet et il le fonde uniquement sur son plus ou moins grand attachement à l'un des deux principes, dont aucun ne repose sur des fondements objectifs, mais seulement sur l'intérêt de la raison, et qui par conséquent, seraient mieux appelés maximes que principes. Ce n'est pas autre chose que le double intérêt de la raison dont chaque partie prend à coeur ou affecte de prendre à coeur un côté, et, par conséquent, la différence des maximes touchant la diversité ou l'unité de la nature qui peuvent bien s'unir absolument, mais, qui, tant qu'on les prend pour des aperçus objectifs, non seulement occasionnent un conflit, mais encore sont des obstacles qui retardent la vérité jusqu'à ce qu'on ait trouvé un moyen de concilier les intérêts opposés et de tranquilliser la raison sur ce point. Ex : la loi de Leibniz dont Bonnet s'est appuyé pour l'échelle continue des créatures ; elle n'est qu'une conséquence du principe d'affinité basé sur l'intérêt de la raison, car l'observation et la vue des dispositions de la nature ne sauraient la fournir à titre d'affirmation. Les degrés de cette échelle, tels que l'expérience peut nous les montrer, sont trop éloignés les uns des autres et nos prétendues petites différences sont ordinairement, dans la nature même, de si vaste abîmes qu'on n'a rien a attendre d'observation de ce genre comme dessein de la nature. Exposition de la méthode de la raison : La méthode qui consiste à chercher l'ordre dans la nature suivant un principe et la maxime qui nous le fait considérer comme fondé dans une nature en général, sans pourtant déterminer où et jusqu'où il s'étend, cette méthode est incontestablement un principe régulateur légitime et excellent de la raison, qui comme tel, va beaucoup trop loin pour que l'expérience et l'observation puissent lui être adéquates, mais qui, sans rien déterminer, leur trace cependant la voie de l'unité systématique (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Dialectique transcendantale, Livre II, Ch 3, Appendice, p466).
Avec la mathématique, nous pouvons nous apercevoir qu'il y a une grande différence entre l'usage discursif de la raison procédant par concepts et son usage intuitif fondé sur la construction des concepts. Or on se demande naturellement quelle est la cause qui rend nécessaire cet usage double de la raison et à quelles conditions on peut reconnaître si c'est seulement le premier ou aussi le second qui a lieu. 1. Toute notre connaissance se rapporte à des intuitions possibles ; 1.1 or c'est par des intuitions possibles qu'un objet est donné ; 1.11 soit un concept a priori contient déjà une intuition pure et dans ce cas il peut être construit ; 1.12 soit un concept a priori ne contient que la synthèse d'intuitions possibles qui ne sont pas données a priori, et alors on peut bien sans doute former par ce concept un jugement synthétique et a priori, mais on ne le fera que discursivement, suivant des concepts, et jamais intuitivement, par la construction du concept ; 2. or, de toutes les intuitions aucune n'est donnée a priori, si ce n'est la simple forme des phénomènes : espace et temps ; 2.1 ainsi on peut représenter a priori dans l'intuition, c'est-à-dire construire un concept de l'espace et du temps, considérés comme quanta, en même temps que leur qualité (leur figure), ou aussi simplement leur quantité (la simple synthèse du divers homogène), par le nombre ; 2.2 or la matière des phénomènes, ce par quoi des choses nous sont données dans l'espace et dans le temps, ne peut être représentée que dans la perception, partant a posteriori ; 2.3 donc le seul concept qui représente a priori ce contenu empirique des phénomènes est le seul concept de la chose en général, et la connaissance synthétique a priori de ce concept ne peut rien fournir de plus que la simple règle de la synthèse de ce que la perception peut donner a posteriori et elle ne fournit jamais a priori l'intuition de l'objet réel parce que celle-ci doit nécessairement être empirique ; 3. donc les propositions synthétiques qui concernent des choses en général dont l'intuition ne peut être donnée a priori sont transcendantales ; 3.1 ainsi les propositions transcendantales ne peuvent jamais être données par construction de concepts, mais seulement suivant des concepts a priori ; 3.2 or les propositions transcendantales contiennent simplement la règle d'après laquelle une certaine unité synthétique de ce qui ne peut être représenté intuitivement a priori (des perceptions) doit être cherchée empiriquement (p497) ; 3.3 donc les propositions transcendantales ne sauraient représenter aucun de leurs concepts a priori , mais elles ne le font qu'a posteriori, au moyen de l'expérience qui n'est en définitive possible que d'après ces propositions synthétiques ; 4. pour juger synthétiquement d'un concept, il faut sortir de ce concept et même recourir à l'intuition dans laquelle il est donné ; 4.1 si l'on s'en tenait à ce qui est contenu dans le concept, le jugement serait simplement analytique, c'est-à-dire qu'il ne serait qu'une explication de la pensée suivant ce qui y est réellement contenu ; 4.2 or je puis aller du concept à l'intuition pure ou empirique qui lui correspond afin de l'y examiner in concreto et de reconnaître a priori ou a posteriori ce qui convient dans le concept ; 4.21 si je vais du concept à l'intuition pure, on a la connaissance rationnelle et mathématique par la construction du concept ; 4.22 si je vais du concept à l'intuition empirique, on a simplement la connaissance empirique (mécanique) qui ne peut jamais donner des propositions nécessaires et apodictiques ; 4.3 donc une proposition transcendantale est une connaissance rationnelle synthétique par simples concepts et, partant, une proposition discursive, puisque c'est par là seulement qu'est possible toute l'unité synthétique de la connaissance empirique, mais aucune intuition n'est donnée par là a priori (p498) ; 5. donc il y a deux usages de la raison qui sont très différents dans leur marche et cela pour cette raison que dans le phénomène, considéré comme ce par quoi tous les objets nous sont donnés, il y a deux éléments : la forme de l'intuition (espace et temps) qui peut être connue et déterminée pleinement a priori, et la matière (élément physique) ou le contenu qui signifie un quelque chose qui se trouve dans l'espace et dans le temps et qui, par conséquent, renferme une existence et correspond à la sensation ; 5.1 en ce qui concerne la forme de l'intuition,, nous pouvons déterminer a priori nos concepts dans l'intuition, puisque nous créons, par une synthèse uniforme, les objets mêmes dans l'espace et dans le temps, en les considérant simplement comme des quanta, cet usage de la raison est l'usage de la raison par la construction des concepts et dans celui-ci ces concepts, se rapportant déjà à une intuition a priori, peuvent aussi être donnée dans l'intuition pure d'une manière déterminée a priori et indépendamment de toutes données (data) empirique ; 5.2 en ce qui concerne la matière, qui ne peut jamais être donnée d'une manière déterminée qu'empiriquement, nous ne pouvons avoir a priori que des concepts indéterminés de la synthèse de sensations possibles, en tant qu'elles appartiennent à l'unité de l'aperception (dans une expérience possible),Cet usage de la raison en est l'usage par concept, et dans cet usage, nous ne pouvons faire autre chose que ramener sous des concepts, quant à leur contenu réel, des phénomènes qui n'y peuvent être déterminés qu'empiriquement, c'est-à-dire a posteriori. On peut donc définir maintenant les deux usages possibles de la raison : 1. La connaissance rationnelle par concepts, qui est appelée philosophique : cette connaissance rationnelle consiste à examiner tout ce qui est (une chose dans l'espace et dans le temps) pour savoir si et à quel point ce quelque chose (qui remplit l'espace ou le temps) est un premier substratum ou une simple détermination, s'il a un rapport d'existence à quelque autre chose, à titre de cause ou d'effet, et enfin s'il est isolé ou s'il est en dépendance réciproque avec d'autres choses quant à l'existence, examiner en un mot, la possibilité de cette existence, sa réalité et sa nécessité ou leurs contraires ; 2. Une opération rationnelle par construction des concepts, et elle s'appelle mathématique : c'est déterminer une intuition a priori dans l'espace (la figure), diviser le temps (la durée) ou simplement connaître le résultat général de la synthèse d'une seule et même chose dans le temps et dans l'espace et la grandeur qui en résulte d'une intuition en général ( le nombre) (Critique de la raison pure, Théorie transcendantale de la méthode, Discipline de la raison pure, Sec 1, p499). Méthode dogmatique de la raison ou du rapport de la raison dans son usage spéculatif aux jugements synthétiques : Toute la raison pure, dans son usage spéculatif, ne renferme pas un seul jugement directement synthétique par concepts. En effet la raison n'est capable de porter, au moyen des idées, aucune jugement synthétique ayant une valeur objective ; tandis qu'au moyen des concepts de l'entendement, elle établit des principes certains non pas directement par concepts, mais indirectement par le rapport de ces concepts à ce quelque chose de tout à fait contingent, qu'est l'expérience possible, car, quand cette expérience (quelque chose comme objet d'expérience possibles) est supposée, ces principes peuvent être sans doute apodictiquement certains, mais en soi ils ne peuvent pas (directement) être connus a priori (p506). Exemple : tout ce qui arrive a sa cause ; 1. personne ne peut l'expliquer par ces seuls concepts donnés, aussi elle n'est pas un dogme ; 2. or au point de vue de l'expérience, c'est-à-dire dans le seul champs de son usage possible, elle peut fort bien être prouvée apodictiquement ; 3. donc cette proposition est appelée un principe (Grundstatz), et non un théorème (Lehrsatz), parce qu'elle a cette propriété particulière de rendre tout d'abord possible sa preuve même, c'est-à-dire l'expérience, et qu'elle doit toujours y être supposée. Si donc il n'y a pas de dogmes dans l'usage spéculatif de la raison pure, même quant au contenu, aucune méthode dogmatique, qu'elle soit empruntée à la mathématique ou qu'elle ait son caractère propre, ne saurait en elle-même lui convenir. Cependant la méthode peut toujours être systématique, en effet notre raison est elle-même (subjectivement) un système, quoique dans son usage pur, qui a lieu au moyen de simples concepts, elle ne soit qu'un système de recherches, suivant des principes, de l'unité dont l'expérience peut seule fournir la matière (Critique de la raison pure, Théorie transcendantale de la méthode, Discipline de la raison pure, Sec 1, p507). De la raison soumise à la critique : Dans toutes ses entreprises la raison doit se soumettre à la critique et elle ne peut par aucune défense porter atteinte à sa liberté sans se nuire à elle-même et sans s'attirer des soupçons défavorables. C'est même sur cette liberté que repose l'existence de la raison, qui n'a point d'autorité dictatoriale, mais dont la décision n'est toujours que l'accord de citoyens libres dont chacun doit pouvoir manifester sans obstacles ses doutes et même son veto (Critique de la raison pure, Théorie transcendantale de la méthode, Discipline de la raison pure, Sec 2, p507). Usage dogmatique de la raison : [par déduction] C'est l'usage de la raison qui prend la défense de ses propositions dans l'affirmation dogmatiques (Critique de la raison pure, Théorie transcendantale de la méthode, Discipline de la raison pure, Sec 2, p508). Usage polémique de la raison :
"J'entends donc par usage polémique de la raison pure la défense de ses propositions contre les négations dogmatiques" (Critique de la raison pure, Théorie transcendantale de la méthode, Discipline de la raison pure, Sec 2, p508).
Il ne s'agit pas de savoir si ces assertions ne pourraient pas aussi par hasard être fausses, mais de constater que personne ne peut jamais affirmer le contraire avec une certitude apodictique, comme nous le montre les antinomies de la raison pure (ou antithétique) : on ne peut démontrer par la raison l'existence ou la non existence d'un être suprême car la raison ne saurait où prendre le principe de ces affirmations synthétiques qui ne se rapportent pas à des objets de l'expérience et à leur possibilité interne. Mais nous pouvons toujours admettre ces propositions, qui s'accordent parfaitement avec l'intérêt spéculatif de notre raison dans l'usage empirique, et qui sont en outre les seuls moyens que nous ayons de le concilier avec l'intérêt pratique, de plus contre l'adversaire nous avons toujours devant nous en réserve la maxime subjective de la raison (p509). De cette manière, il n'y a plus, à proprement parler, d'antithétique de la raison pure. Car son unique arène devrait être cherchée dans le champs de la théologie et de la psychologie pure, mais ce terrain ne souffre aucun champion qui soit tout à fait cuirassé et muni d'armes redoutables (p510). Ce qui est ici en litige ce n'est pas la chose, mais le ton. Car vous avez toujours le moyen de parler le langage d'une foi solide justifiée par la raison la plus sévère, quand même il vous faudrait abandonner celui de la science (p511). Il n'y a donc, à proprement parler, aucune polémique dans le champs de la raison pure. Les deux partis frappent des coups en l'air et se battent contre leur ombre, car ils sortent des limites de la nature pour aller dans une région où il n'y a rien que leurs serres dogmatiques puissent saisir et retenir (Critique de la raison pure, Théorie transcendantale de la méthode, Discipline de la raison pure, Sec 2, p517). Usage sceptique de la raison pure ou du principe de la neutralité dans toutes les controverses : On ne peut admettre ce principe car exciter la raison contre elle-même, lui donner des armes des deux côtés et regarder tranquillement et d'un air railleur cette lutte ardente, cela ne fait pas un bon effet au point de vue dogmatique, mais semble dénoter un esprit malin et méchant. En effet, s'en tenir entièrement à ces doutes et vouloir recommander la conviction et l'aveu de son ignorance, non seulement comme un remède contre la suffisance dogmatique, mais aussi comme un moyen de terminer le conflit de la raison avec elle-même, c'est là un projet parfaitement vain et qui ne peut nullement procurer le repos à la raison, mais qui n'est, au contraire, qu'un moyen excellent de la tirer de son doux rêve dogmatique pour l'exciter à examiner attentivement son état (p517). 1. la conscience de mon ignorance, au lieu de mètre fin à mes recherche, est au contraire, la vraie cause qui les provoque ; 1.1 toute ignorance est ou celle des choses ou celle de la détermination et des limites de ma connaissance ; 1.11 quand l'ignorance est accidentelle, elle doit me porter soit à faire des choses (des objets) une recherche dogmatique, soit dans la connaissance à rechercher d'une façon critique les limites de ma connaissance possible ; 1.12 quand l'ignorance est absolument nécessaire, et donc me dispense de recherches ultérieures, c'est là ce qu'on ne peut pas établir empiriquement par l'observation, mais seulement d'une façon critique en sondant les sources premières de notre connaissance ; 1.2 or, en tant que la détermination des limites de notre raison ne peut donc être faite que suivant des principes a priori, nous pouvons connaître a posteriori qu'elle est bornée par ce qui nous reste encore à savoir dans toute science, car ce n'est là qu'une connaissance indéterminée d'une ignorance à jamais invincible ; 1.21 la première connaissance de l'ignorance de la raison, qui n'est possible que par la critique de la raison elle-même, est donc une science ; 1.22 la seconde connaissance de l'ignorance de la raison n'est qu'une perception dont on ne peut pas dire jusqu'où la conclusion s'étend par elle-même (p518) ; La censure de la raison est cette méthode, qui consiste à soumettre à l'examen et, quand cela se trouve, au blâme, les faits de la raison. Il est incontestable que cette censure conduit inévitablement au doute par rapport à tout usage transcendant des principes. mais ce n'est là que le second pas qui est encore loin de déterminer l'oeuvre : 1. le premier pas, dans les choses de la raison pure, qui en marque l'enfance, est dogmatique ; 1.1 toutes les vaines tentatives dogmatiques de la raison sont des faits qu'il est toujours utile de soumettre à la censure (p521) ; 1.2 pour le dogmatique sans critique, qui n’a pas mesuré la sphère de son entendement ni, par suite, déterminé, suivant des principes, les limites de la connaissance possible et qui ne sait donc pas d'avance ce qu'il peut, mais pense le trouver par de simples essais, les attaques sceptiques sont dangereuses et fatales (p523) ; 2. le second pas est sceptique et témoigne de la prudence du jugement affiné par l'expérience ; 2.1 mais le scepticisme est pour la raison humaine une halte, d'où elle peut songer au chemin dogmatique qu'elle vient de faire et esquisser le plan du pays où elle se trouve, pour être à même de choisir désormais sa route avec plus de sûreté, ce n'est pas un cantonnement où elle puisse se fixer, car elle ne peut trouver sa résidence que dans une parfaite certitude, soit de la connaissance des objets mêmes, soit de la connaissance des limites dans lesquelles est renfermées toute notre connaissance des objets (p520) ; 2.2 toute polémique sceptique n'est proprement dirigée que contre le dogmatique, qui, sans se méfier de ses premiers principes objectifs, c'est-à-dire sans le secours de la Critique, poursuit gravement son chemin, et cette polémique n'a pour but que de déranger ses plans et de le ramener à la connaissance de lui-même ; 2.3 donc, en soi, la polémique sceptique ne décide rien par rapport à ce que nous savons et à ce que nous ne pouvons pas savoir (p521) ; 2.31 ainsi le sceptique est le surveillant qui conduit le raisonneur dogmatique à une saine critique d e l'entendement et de la raison elle-même et dés qu'il y est parvenu, il n'a plus à craindre aucune attaque, car il distingue alors de sa possession ce qui est entièrement en dehors d'elle, il n'y élève plus de prétentions et ne s'engage plus ainsi en des querelles (p524) ; 3. le troisième pas est critique et consiste à soumettre à l'examen non point les faits de la raison, mais la raison même en ce qui concerne tout son pouvoir et tout la capacité qu'elle a d'arriver à des connaissances pures a priori. Ce n'est plus ici la censure, mais la critique de la raison, et celle-ci ne se contente pas de conjecturer simplement que notre raison a des bornes, mais elle en démontre, par des principes, les limites déterminées, elle n'en montre pas simplement l'ignorance par rapport à tel ou tel point, mais par rapport à toutes les questions possibles d'une certaine espèce (p519). 3.1 la censure ne peut donc jamais déterminer la querelle qui porte sur les droits de la raison humaine (p521) ; 3.2 la méthode critique en elle-même ne satisfait pas aux questions de la raison mais elle la prépare, cependant, à les résoudre, en excitant sa vigilance et en lui montrant les moyens solides de s'assurer dans sa possession légitime (p524) (Critique de la raison pure, Théorie transcendantale de la méthode, Discipline de la raison pure, Sec 2, p524). De la défense de la raison dans son usage polémique ou du rôle des hypothèses : "Ce que j'entends pas se défendre, ce n'est pas augmenter les preuves de son assertion, mais simplement réduire à néant les raisons apparentes par lesquelles l'adversaire prétend ruiner notre propre assertion" (Critique de la raison pure, Théorie transcendantale de la méthode, Discipline de la raison pure, Sec 3, p527).
Bien que dans les questions simplement spéculatives de la raison pure il n'y ait pas lieu de faire des hypothèses pour y fonder des propositions, les hypothèses y sont tout à fait admissible quand il ne s'agit que de se défendre, c'est-à-dire dans l'usage polémique et non dans l'usage dogmatique de la raison. Or, toutes les propositions synthétiques de la raison pure ont ceci de particulier que si celui qui affirme la réalité de certaines idées n'est sait jamais assez pour rendre sa proposition certaine, d'un autre côté, l'adversaire n'en sait pas d'avantage pour soutenir le contraire. Ainsi la raison humaine tient la balance égale des deux côtés, elle ne favorise aucune des deux parties dans la connaissance spéculative, aussi est-elle un champs où se livrent des combats (p527). C'est pourquoi l'adversaire peut avoir recours à des hypothèses qui ne peuvent nullement servir à fortifier la preuve, mais seulement à faire voir que l'adversaire sait trop peu de l'objet du débat pour pouvoir se flatter de l'emporter sur nous au point de vue de la connaissance spéculative. Mes hypothèses ne sont donc permises dans le champs de la raison pure qu'en qualité d'armes de guerre, elles ne servent pas à fonder un droit, mais seulement à le défendre. Mais ici nous devons toujours chercher en nous-mêmes, car la raison spéculative, dans son usage transcendantal, est en soi dialectique (p528). On voit donc par là que, dans l'usage spéculatif de la raison, les hypothèses n'ont aucune valeur comme opinions en soi, mais simplement par rapport à des prétentions transcendantes opposée. En effet, étendre les principes de l'expérience possible à la possibilité des choses en général, n'est pas moins transcendant que d'affirmer la réalité objective de concepts qui ne peuvent trouver leurs objets qu'en dehors des limites de toute expérience possible. Ce que la raison pure juge assertoriquement (comme tout ce que connaît la raison) doit être nécessairement ou ce n'est absolument rien. Mais les hypothèses dont il s'agit ne sont que des jugements problématiques qui, du moins, ne sont réfutés par rien, bien qu'ils ne puissent évidemment être prouvés par rien, et ils sont, par conséquent, de pures opinions privées. Il faut leur conserver cette qualité et bien prendre garde qu'elles ne se donnent pas comme croyable en elles-mêmes et comme ayant une valeur absolue, et qu'elles n'étouffent la raison sous des fictions et des illusions (Critique de la raison pure, Théorie transcendantale de la méthode, Discipline de la raison pure, Sec 3, p530). Discipline de la raison pure par rapport à ses démonstrations : 1. les preuves des propositions transcendantales et synthétiques ont ceci de particulier entre toutes les preuves d'une connaissance synthétique a priori que la raison, au moyen de ses concepts, ne doit pas s'y appliquer directement à l'objet, mais démontrer auparavant a priori la valeur objective des concepts et la possibilité de leur synthèse ; 1.1 ce n'est pas là simplement une règle de prudence nécessaire, il y va de la nature et de la possibilité des preuves mêmes ; 1.2 or, sortir a priori du concept d'un objet, on ne le peut sans un fil conducteur particulier et qu'on trouve hors du concept ; 1.21 dans la connaissance transcendantale, où l'on a simplement affaire à des concepts de l'entendement, cette règle est l'expérience possible ; 1.22 en effet la preuve ne montre pas que le concept donné conduit directement à un autre concept, car un pareil passage serait un saut qu'on ne saurait justifier, mais elle montre que l'expérience même, et, par suite, l'objet de l'expérience serait impossible sans une telle liaison ; 1.3 donc on devrait en même temps montrer la possibilité d'arriver synthétiquement et a priori à une certaine connaissance des choses qui n'était pas contenu dans leur concept (p531) ; 2. mais si la proposition à prouver est une assertion de la raison pure et que je veuille aussi au moyen de simples idées sortir de mes concepts d'expérience, il faut alors que cette proposition contienne encore en soi la légitimation d'un tel pas de la synthèse qui est une condition nécessaire de sa force démonstrative ; 2.1 il est absolument nécessaire d'avoir en main un critérium permanent de la possibilité des propositions synthétiques qui doivent prouver plus que l'expérience ne peut donner ; 2.2 or ce critérium ne consiste pas à rapprocher directement à la preuve le prédicat désiré, mais à ne l'y rattacher que par l'intermédiaire d'un principe de la possibilité d'étendre a priori notre concept donné jusqu'aux idées et de les réaliser ; 2.21 si avant de chercher la preuve, on commençait par examiner sagement en soi-même comment et avec quel motif d'espoir on peut bien attendre de la raison pure une telle extension et d'où on veut en tirer ces vues qui ne peuvent être dérivées de concepts, ni anticipées par rapport à l'expérience possible, on s'épargnerait ainsi beaucoup d'effort pénibles et cependant stériles, car on attribuerait plus à la raison ce qui est manifestement au-dessus de son pouvoir, ou plutôt on soumettrait à la discipline de la température cette faculté qui ne se modère pas volontiers dans les élans où elle est entraînée par son désir d'extension spéculative (p532) ; Règle première : Il ne faut tenter aucune preuve transcendantale sans avoir auparavant réfléchi et sans s'être rendu compte de la source à laquelle on puisera les principes sur lesquels on veut la fonder et du droit qui autorise à en attendre un bon résultat dans ses conclusions ;
1. s'il s'agit des principes de l'entendement, il est inutile de vouloir arriver par leur moyen à des idées de la raison pure, car ils ne valent que pour des objets de l'expérience possible ; 2. s'il s'agit des principes tirés de la raison pure, toute peine est perdue. Car la raison, sans doute, a des principes de ce genre, mais comme principes objectifs, ils sont tous dialectiques et ne peuvent en tout cas avoir de valeur comme principes régulateurs de l'usage systématique de l'expérience. Règle seconde : Dans les démonstrations transcendantales, pour chaque proposition transcendantale on ne peut trouver qu'une seule preuve ;
1. Quand je ne dois pas conclure de concepts, mais de l'intuition qui correspond à un concept (intuition pure mathématique ou intuition empirique physique) alors l'intuition prise pour fondement me donne une matière diverse de propositions synthétiques que je puis lier de plusieurs manières, et libre de partir de plus d'un point, je puis, par différents chemins, arriver à la même proposition ; 2. or toutes propositions transcendantale ne part que d'un seul concept, et elle exprime la condition synthétique de la possibilité de l'objet d'après ce concept ; 3. donc il ne peut y avoir qu'un seul argument, parce que hors de ce concept il n'y a rien de plus par quoi l'objet puisse être déterminé et que, par conséquent, la preuve ne peut rien renfermer rien de plus que la détermination d'un objet en général d'après ce concept qui aussi unique (p533) ;
Ex : dans l'analytique transcendantal, on a tiré le principe suivant : tout ce qui arrive a une cause, de la condition unique de la possibilité objective d'un concept de ce qui arrive en général ;
1. en effet la détermination d'un événement dans le temps, et donc cet événement comme appartenant à l'expérience, serait impossible s'il n'était soumis à une règle dynamique de ce genre ; 2. or, c'est aussi le seul argument possible, car c'est seulement parce qu'un objet est déterminé pour le concept au moyen de la loi de causalité que l'événement représenté a de la valeur objective, c'est-à-dire de la vérité. Règle troisième : Quand la raison pure est soumise à une discipline par rapport aux preuves transcendantales, c’est que ses preuves ne doivent jamais être apagogiques, mais toujours ostensives.
1. La preuve directe ou ostensive, dans toutes espèces de connaissance, est celle qui joint à la conviction de la vérité la vue des sources de cette vérité ; 2. la preuve apagogique peut sans doute produire la certitude, mais non la compréhension de la vérité au point de vue de l'enchaînement des raisons de sa possibilité ; 2.1 ces espèces de preuves sont plutôt un secours en cas d'urgence qu'un procédé qui satisfasse à toutes les vues de la raison ; 2.2 sous le rapport de l'évidence, elles ont un avantage sur les preuves directes, en ce que la contradiction emporte toujours avec elle plus de clarté dans la représentation que ne saurait le faire la meilleure synthèse et qu'elle s'approche ainsi d'avantage du caractère intuitif d'une démonstration ; 2.3 le vrai motif pour lequel on se sert de preuves apagogiques dans diverses sciences, c'est que, quand les principes d'où l'on doit dériver une certaine connaissance sont trop divers ou trop profondément cachés, on cherche à voir si l'on ne pourrait pas l'atteindre par des conséquences ; 2.31 mais le modus ponens qui conclut la vérité d'une connaissance de la vérité de ses conséquences n'est permis que si toutes les conséquences possibles qui en découlent sont vraies, car alors il ne peut y avoir qu'un seul principe qui est, par conséquent, le vrai ; 2.32 or ce procédé est impraticable, parce qu'il est au-dessus de nos forces d'apercevoir toutes les conséquences possibles d'une proposition admise, quelle qu'elle soit, on se sert cependant de cette manière de raisonner, bien qu'avec une certaine complaisance, quand il s'agit de prouver simplement quelque chose à titre d'hypothèse, en admettant ce raisonnement par analogie que, si toutes les autres conséquences qu'on a cherchée concordent bien avec le principe admis, toutes les autres conséquences possibles devront aussi s'accorder avec lui ; 2.33 donc une hypothèse ne peut jamais être transformée en vérité démontrée et le modus tollens des raisonnement qui concluent des conséquences aux principes ne prouvent pas seulement rigoureusement, mais encore avec beaucoup de facilité ; 2.331 il suffit qu'une seule fausse conséquence puisse être tirée d'un principe pour que ce principe soit faux ; 2.332 or, si, au lieu de parcourir dans une preuve ostensive toute la série des principes qui peuvent conduire à la vérité d'une connaissance, grâce à la complète intelligence de sa possibilité, on peut trouver une seule conséquence fausse parmi celles qui découlent du principe contraire, ce contraire est faux aussi et, par suite, la connaissance qu'on avait à prouver est vraie ; 2.4 la démonstration apagogique ne peut être permise que dans les science où il est impossible de substituer le subjectif de nos représentations à l'objectif, c'est-à-dire à la connaissance de ce qui est dans l'objet ; 2.41 là où domine l'objectif, il peut y avoir deux possibilités : 2.411 soit que le contraire d'une certaine proposition contredise simplement aux conditions subjectives de la pensée, mais non à l'objet ; 2.412 soit que les deux propositions ne se contredisent l'une l'autre que sous une condition subjective, que l'on prend faussement comme objective, et que, comme la condition est fausse, toutes deux peuvent être fausse, sans que de la fausseté de l'une on puisse conclure la vérité de l'autre ; 2.42 or les tentatives transcendantales de la raison pure sont toutes faites dans le propre médium de l'apparence dialectique, c'est-à-dire du subjectif, qui s'offre ou même qui s'impose à la raison comme objectif dans ses prémisses ; 2.421 soit cette réfutation n'est autre chose que la simple représentation du conflit de l'opinion opposée avec les conditions subjectives qui permettent à notre raison de comprendre et cela ne sert à rien pour rejeter la chose même ; 2.422 soit les deux parties, aussi bien celle qui affirme que celle qui nie, trompées par l'apparence transcendantale, prennent pour fondement un concept impossible de l'objet, et alors s'applique la règle : non entis nulla sunt praedicata, c'est-à-dire que ce qu'on affirme et ce qu'on nie de l'objet est, de part et d'autre, inexact, et qu'il est impossible d'arriver apagogiquement, par la réfutation du contraire, à la connaissance de la vérité (p536) ; 2.43 donc chacun doit établir sa cause au moyen d'une preuve loyalement conduite par la déduction transcendantale des arguments c'est-à-dire directement, pour que l'on voie ce que ses prétentions rationnelles peuvent alléguer en leur faveur ; 2.431 si l'adversaire s'appuie sur des principes subjectifs, il est assurément aisé de le réfuter, mais sans que le dogmatique en puisse tirer aucun avantage, puisqu'il est de même attaché généralement aux principes subjectifs du jugement et qu'il peut être également mis au pied du mur par son adversaire ; 2.432 si les deux parties procèdent directement, ou bien elles remarqueront d'elles-mêmes la difficulté et même l'impossibilité de trouver le titre de leurs affirmations et elles ne pourront en définitive s'en rapporter qu'à la prescription, ou bien la critique découvrira facilement l'apparence dogmatique et forcera la raison pure à abandonner sas prétentions exagérées dans l'usage spéculatif et à se renfermer dans les limites du terrain qui lui est propre, c'est-à-dire des principes pratiques (Critique de la raison pure, Théorie transcendantale de la méthode, Discipline de la raison pure, Sec 4, p537). Avantage négatif de philosophie de la raison pure : Le plus grand et peut-être l'unique profit de la philosophie de la raison pure n'est sans doute que négatif, c'est qu'elle n'est pas un organe qui serve à étendre les connaissances, mais une discipline qui sert à en déterminer les limites, et au lieu de découvrir la vérité, elle n'a que le mérite silencieux de prévenir les erreurs (Critique de la raison pure, Théorie transcendantale de la méthode, Canon de la raison pure, p538). De la raison dans son usage spéculatif : La raison dans son usage spéculatif, nous a conduit à travers le champs des expériences et, comme pour elle il n'y avait pas de satisfaction complète à trouver dans ce champs, elle nous a menés aux idées spéculatives, qui à leur tour, nous ont ramenés à l'expérience et qui ont ainsi rempli son dessein d'une manière utile mais nullement conforme à notre attente (Critique de la raison pure, Théorie transcendantale de la méthode, Canon de la raison pure, Sec 2, p543). De l'avantage positif ou de l'usage pratique de la raison pure : Il doit y avoir une source de connaissances positives qui appartiennent au domaine de la raison pure et qui ne sont peut-être une occasion d'erreurs que par l'effet d'un malentendu, mais qui en réalité constituent le but que poursuit la raison, but qui à pour cause d'attribuer le désir indomptable de poser quelque part un pied ferme au-delà des limites de l'expérience. Ainsi la raison soupçonne des objets qui ont pour elle un grand intérêt et elle entre dans le chemin de la spéculation pure pour se rapprocher d'eux, mais ils fuient devant elle. Mais elle peut sans doute espérer plus de bonheur sur l'unique voie qui lui reste encore, celle de l'usage pratique (Critique de la raison pure, Théorie transcendantale de la méthode, Canon de la raison pure, p538). Il s'agit donc de laisser de côté le point de vue spéculatif de la raison pour ne s'occuper que des problèmes dont la solution constitue son but final, qu'elle puisse ou non l'atteindre, but par rapport auquel tous les autres n'ont que la valeur de simples moyens. Ces fins suprêmes, d'après la nature de la raison, doivent avoir leur unité afin de faire avancer en commun cet intérêt de l'humanité qui n'est subordonné à aucun autre plus élevé (Critique de la raison pure, Théorie transcendantale de la méthode, Canon de la raison pure, Sec 1, p539). De la raison dans son usage pratique : Par rapport à l'usage pratique, la raison a le droit d'admettre quelque chose qu'elle ne serait nullement autorisée à supposer sans des preuves suffisantes dans le champs de la simple spéculation, parce que toutes les suppositions de ce genre font tort à la perfection de la spéculation dont l'intérêt pratique ne se préoccupe point (Critique de la raison pure, Théorie transcendantale de la méthode, Discipline de la raison pure, Sec 3, p528). C'est pourquoi le but final auquel se rapporte la spéculation de la raison dans son usage transcendantal concerne trois objets : la liberté de la volonté, l'immortalité de l'âme et l'existence de Dieu (p539). En effet, ces trois propositions demeurent toujours transcendantes pour la raison spéculative et elles n'ont pas le moindre usage immanent c'est-à-dire recevable pour objets de l'expérience et sont donc utile pour nous de quelque manière, mais considérées en elles-mêmes, elles sont des efforts de notre raison tout à fait oiseux et par surcroît extrêmement pénibles. Si donc ces trois propositions cardinales ne sont pas du tout nécessaires au point de vue du savoir, et si, cependant, elles nous sont instamment recommandées par notre raison, leur importance ne devra proprement concerner que l'ordre pratique (p540). Tout l'appareil de la raison dans le travail qu'on peut appeler philosophie pure n'a donc pour but que ces trois problèmes. Mais ceux-ci ont eux-mêmes à leur tour une fin plus éloignée, à savoir : ce qu'il faut faire si la volonté est libre, s'il y a un Dieu et une vie future. Or, comme il s'agit ici de notre conduite par rapport à la fin suprême, le but final des sages dispositions de la nature prévoyante dans la constitution de notre raison n'appartient qu'à la seule morale (p541). Au point de vue pratique nous ne demandons immédiatement à la raison que la règle de la conduite (Critique de la raison pure, Théorie transcendantale de la méthode, Canon de la raison pure, Sec 1, p542). La raison pure contient dans son usage pratique, c'est-à-dire dans l'usage moral, des principes de la possibilité de l'expérience, à savoir d'actions, qui conformément aux principes moraux, pourraient être trouvées dans l'histoire de l'homme. En effet, comme la raison pure proclame que ces actes doivent avoir lieu, il faut aussi qu'ils puissent avoir lieu et il faut donc qu'une espèce particulière d'unité systématique soit possible, c'est-à-dire de l'unité morale (p544). Et ainsi si la raison a de la causalité par rapport à la liberté en général, elle n'en a point par rapport à toute la nature, et que si des principes moraux de la raison peuvent produire des actes libres, les lois de la nature ne le peuvent pas. Donc les principes de la raison pure, dans son usage moral, ont une réalité objective (p545). De la raison pratique et de l'idéal du souverain bien : Quand la raison pratique a atteint ce point sublime, c'est-à-dire le concept d'un être premier et unique, comme souverain bien, elle n'a nullement le droit de faire comme si elle s'était élevée au-dessus de toutes les conditions empiriques de son application et comme si elle était parvenue à la connaissance de nouveaux objets, c'est-à-dire de partir de ce concept et d'en dériver les lois morales mêmes (p550). En effet, c'est précisément la nécessité pratique interne de ces lois qui nous a conduits à supposer une cause subsistant par elle-même ou un sage gouverneur du monde, afin de donner à ces lois leur effets, et, par suite, nous ne pouvons plus d'après cela, les considérer à leur tour comme contingentes et comme dérivées d'une simple volonté, surtout d'une volonté dont nous n'aurions absolument aucun concept si nous ne nous l'étions formé conformément à ces lois (Critique de la raison pure, Théorie transcendantale de la méthode, Canon de la raison pure, Sec 2, p551). Tout intérêt de ma raison (spéculatif aussi bien que pratique) est contenu dans ces trois questions : 1. Que puis-je savoir? 2. Que dois-je faire? 3. Que m'est-il permis d'espérer?
1.1 La première question est simplement spéculative ; 2.1 la deuxième question est simplement pratique. Si elle peut, à ce titre, appartenir à la raison pure, elle n'est pourtant pas transcendantale, mais morale, et par suite, elle ne peut pas en elle-même faire partie de notre Critique (p543), mais elle peut être désignée par la maxime suivante :
"Fais ce qui peut te rendre digne d'être heureux" (p545).
3.1 La troisième question : si je fais ce que je dois faire, que m'est-il permis d'espérer? est à la fois pratique et théorique, de sorte que l'ordre pratique ne conduit que comme un fil conducteur à la solution de la question théorique, et, quand celle-ci s'élève, de la question spéculative. En effet, tout espoir tend au bonheur et est à l'ordre pratique et à la loi morale ce que le savoir et la loi naturelle sont à la connaissance théorique des choses (p543). L'espoir aboutit à cette conclusion que quelque chose est (qui détermine le dernier but possible), puisque quelque chose doit arriver, le savoir, à cette conclusion que quelque est (qui agit comme cause suprême), parce que quelque chose arrive (Critique de la raison pure, Théorie transcendantale de la méthode, Canon de la raison pure, Sec 2, p544). 3.2 or, la question est de savoir si, en me conduisant de manière à ne pas être indigne du bonheur, je puis espérer y participer ; 3.21 pour répondre à cette question, il s'agit de savoir si les principes de la raison pure qui prescrivent la loi a priori y rattachent aussi, nécessairement, cette espérance ; 3.22 or, de même que les principes moraux sont nécessaires, selon la raison, dans son usage pratique, il est aussi nécessaire, selon la raison, d'admettre, dans son usage théorique, que chacun a sujet d'espérer le bonheur dans la même mesure où il s'en est rendu digne par sa conduite, et que, par conséquent, le système de la moralité est inséparablement lié à celui du bonheur, mais seulement dans l'idée de la raison pure (p545) ; 3.3 donc, c'est dans un monde intelligible, c'est-à-dire dans un monde moral, dans le concept duquel nous faisons abstraction de tous les obstacles opposés à la moralité (des inclinations), qu'un tel système de bonheur proportionnellement lié à la moralité peut se concevoir comme nécessaire, car la liberté, excitée, d'une part, et retenue, de l'autre, par les lois morales, serait elle-même la cause du bonheur universel, et, par conséquent, les êtres raisonnables eux-mêmes seraient, sous la direction de ces principes, les auteurs de leur propre bien-être constant en même temps que de celui des autres ; 3.31 ce système de la moralité qui se récompense elle-même n'est qu'une idée dont la réalisation repose sur la condition que chacun fait ce qu'il doit, c'est-à-dire que toutes les actions des êtres raisonnables arrivent comme si elles sortaient d'une volonté suprême qui embrasse en elle ou sous elle toutes les volontés particulières ; 3.32 or, comme l'obligation qui ressort de la loi morale reste valable pour l'usage particulier de la liberté de chacun, quand même les autres ne se conformeraient pas à cette loi, il en résulte que ni la nature des choses du monde, ni la causalité des actions elles-mêmes et leur rapport à la moralité ne déterminent la manière dont leur conséquence se rapportent au bonheur 3.33 donc la raison, si l'on prend simplement la nature pour fondement, ne saurait reconnaître la liaison nécessaire, dont nous avons parlé, qui existe entre l'espoir d'être heureux et l'effort incessant qu'on fait pour se rendre digne du bonheur, mais elle ne peut l'espérer qu'en posant en principe, comme cause de la nature, [l'idée d'] une raison suprême qui commande suivant des lois morales, c'est-à-dire de l'idéal du souverain bien ; 3.31 en tant que cet idéal du souverain bien est l'idée d'une telle intelligence, où la volonté, la plus parfaite moralement, jouissant de la souveraine félicité, est la cause de tout bonheur dans le monde, en tant que ce bonheur est en rapport étroit avec la moralité (c'est-à-dire, avec ce qui rend digne d'être heureux), la raison pure ne peut donc trouver que dans l'idéal du souverain bien originaire le principe de connexité pratiquement nécessaire des deux éléments du souverain bien dérivé, c'est-à-dire dans un monde intelligible ou moral ; 3.32 or, comme nous devons nous représenter nous-mêmes, d'une manière nécessaire, par la raison, comme faisant partie d'un monde de ce genre, bien que les sens ne nous présentent qu'un monde de phénomènes, nous devons admettre ce monde, comme une conséquence de notre conduite dans le monde sensible, et puisque ce dernier ne nous offre pas une telle liaison, comme un monde à venir pour nous ; 3.33 donc Dieu et une vie future sont, suivant les principes de la raison pure, deux suppositions inséparables de l'obligation que nous impose cette même raison ; 3.331 la moralité en soi constitue un système, mais il n'en va pas de même du bonheur, à moins que la distribution n'en soit exactement proportionnelle à la moralité ; 3.332 or cette proportion n'est possible que dans le monde intelligible gouverné par un sage créateur (p546) ; 3.333 donc la raison se voit forcée d'admettre un tel être, ainsi que la vie dans un monde que nous devons considérer comme un monde futur, ou de regarder les lois morales comme de vaines chimères, puisque la conséquence nécessaire qu'elle-même rattache à ces lois devrait s'évanouir sans cette supposition ; 3.4 il est nécessaire que toute notre manière de vivre soit subordonnée à des maximes morales, mais il est en même temps impossible que cela ait lieu, si la raison ne lie pas à la loi morale, qui n'est qu'une simple idée, une cause efficiente qui détermine, d'après notre conduite par rapport à cette loi, un dénouement correspondant exactement, soit dans cette vie, soit dans une autre, à nos fins les plus élevées ; 3.41 sans un Dieu et sans un monde actuellement invisible pour nous, mais que nous espérons, les magnifiques idées de la morale pourraient bien être des objets d'assentiment et d'admiration, mais ce ne sont pas des mobiles d'intention et d'exécution, parce qu'elles ne remplissent pas toute la fin qui est assignée naturellement a priori précisément par cette même raison à tout être raisonnable et qui est nécessaire ; 3.42 or le bonheur seul est loin d'être pour notre raison le souverain bien, en effet elle ne l'approuve que s'il s'accorde avec ce qui rend digne d'être heureux, c'est-à-dire avec la bonne conduite morale, de même, la moralité seule et avec elle la simple qualité d'être digne d'être heureux, ne son pas non plus le souverain bien ; 3.421 pour que le bien soit parfait, il faut que celui qui ne s'est pas conduit de manière à se rendre indigne du bonheur puisse y participer ; 3.422 or, la raison elle même, libre de toue considération personnelle, ne peut pas juger autrement lorsque, sans égard à aucun intérêt particulier, elle se met à la place d'un être qui pourrait distribuer aux autres toute félicité ; 3.4221 en effet, dans l'idée pratique, les deux éléments sont essentiellement liées, mais de telle sorte que l'intention morale est la condition qui rend tout d'abord possible la participation au bonheur et non pas réciproquement, la perspective du bonheur, l'intention morale car autrement l'intention de serait pas morale et par suite, elle ne serait pas digne de tout le bonheur qui, pour la raison ne connaît d'autres limites que celles qui viennent de notre propre immoralité ; 3.43 donc le bonheur, exactement proportionné à la moralité des êtres raisonnables, par laquelle ils s'en rendent dignes, constitue seul le souverain bien d'un monde où nous devons, selon les préceptes de la raison pure, mais pratique, entièrement nous placer et n'est qu'un monde intelligible, puisque le monde sensible ne nous permet pas d'attendre de la nature des choses une telle unité systématique des fins , et la réalité n'en peut être fondée que sur la supposition d'un bien suprême originaire, une raison subsistant par elle-même et douée d toue la puissance d'une cause suprême y fonde, y entretient et y accomplit, suivant la finalité la plus parfaite, l'ordre universel des choses, bien que cet ordre nous soit profondément caché dans le monde sensible (Critique de la raison pure, Théorie transcendantale de la méthode, Canon de la raison pure, Sec 2, p548).
Ce sont Dieu, la liberté et l'immortalité, et la science qui, avec tous ces procédés, n'a proprement pour but final que la solution de ces problèmes, se nomme la métaphysique (Critique de la raison pure, Intro 2°ed., p35). La mathématique nous montre combien nous pouvons aller loin, indépendamment de l'expérience, dans la connaissance a priori mais cela seulement parce qu'elle s'occupe d'objets et de connaissances que dans la mesure où celles-ci se laissent représenter dans l’intuition, or cette intuition peut elle-même être donnée a priori et se distingue à peine d'un simple concept pur. Encouragée par une telle preuve de la force de la raison, la passion de pousser plus loin ne voit plus de limites :
"La colombe légère, lorsque, dans son libre vol, elle fend l'air dont elle sent la résistance, pourrait s'imaginer qu'elle réussirait mieux encore dans le vide" (Critique de la raison pure, Intro 2°ed., p36).
C'est ainsi que Platon quitta le monde sensible parce que ce monde oppose à l'entendement trop d'obstacles divers, et se risqua au-delà de ce monde, sur les ailes des idées, dans le vide de l'entendement pur. Mais c'est le destin ordinaire de la raison humaine, dans la spéculation, de terminer son édifice aussitôt que possible et de n'examiner qu'ensuite les fondements eux aussi, ont été posés. Or pendant que nous bâtissons, quelque chose nous affranchit de toute préoccupation et de tout soupçons, en nous donnant l’illusion de fondements qui paraissent solides. C'est qu'une grande part, peut-être la plus grande de l'oeuvre de notre raison, consiste en analyse des concepts que nous avons déjà des objets (Critique de la raison pure, Intro 1°ed., p36). Objet de la critique de la raison pure : Il s'agit de savoir si aussi, en général, est possible une extension de notre connaissance et dans quel cas elle peut l'être, nous pouvons considérer une science qui se borne à rendre compte de la raison pure, de ses sources et de ses limites comme une propédeutique du système de la raison pure. Une telle science est une critique de la raison pure. De l'utilité négative d'une critique de la raison pure : Son utilité est négative en ce sens qu'elle servirait non pas à étendre, mais uniquement à clarifier notre raison qu'elle préserverait d'erreurs (Critique de la raison pure, Intro 1°ed., p46). De la division de la critique de la raison pure : La critique que nous entreprenons doit contenir (Critique de la raison pure, Intro 1°ed., p49). :
1. Une théorie des éléments. 2. Une théorie de la méthode.
En tant qu'il doit y avoir de la raison dans les sciences, il faut qu'on y connaisse quelque chose a priori, et la connaissance de la raison peut se rapporter à son objet de deux manières, soit simplement pour déterminer cet objet et son concept (qui doit être donné d'autre part), soit aussi pour le réaliser. Il faut que la partie pure de chacune, si étendu ou si restreint que puisse être son contenu, à savoir, celle dans laquelle la raison détermine son objet (Object) entièrement a priori, soit exposée tout d'abord seule et sans aucun mélange de ce qui vient d’autres sources (Critique de la raison pure, Préface 2°ed., p16). De la connaissance théorique de la raison : La mathématique et la physique sont les deux connaissances théoriques de la raison qui doivent déterminer leurs objets (Object) a priori, la première d'une façon entièrement pure, la seconde au moins en partie, mais alors en tenant compte d'autres sources de connaissance que celles de la raison. Le premier qui démontra le triangle isocèle eut une révélation, car il trouva qu'il ne devait pas suivre pas à pas ce qu'il voyait dans la figure, ni s'attacher au simple concept de cette figure, comme si cela devait lui en apprendre les propriétés, mais qu'il lui fallait réaliser ou construire cette figure, au moyen de ce qu'il y pensait et s'y représentait lui-même a priori par concepts (c'est-à-dire par construction), et que, pour savoir sûrement quoi que ce soit a priori , il ne devait attribuer aux choses que ce qui résulterait nécessairement de ce que lui-même y avait mis, conformément à son concept (Critique de la raison pure, Préface 2°ed., p17). Il faut considérer ici la physique qu'en tant qu'elle est fondée sur des principes empiriques. Avec la physique les scientifiques comprirent que la raison ne voit que ce qu'elle produit elle-même d'après ses propres plans et qu'elle doit prendre les devants avec les principes qui déterminent ses jugements, suivant des lois immuables, qu'elle doit obliger la nature à répondre à ses questions et ne pas se laisser conduire pour ainsi dire en laisse par elle. Il faut donc que la raison se présente à la nature tenant, d'une main, ses principes, pour être instruite par elle, mais non pas comme un écolier qui se laisse dire tout ce qu'il plaît au maître, mais au contraire, comme un juger en fonction qui force les témoins à répondre aux questions qu'il leur pose (Critique de la raison pure, Préface 2°ed., p17). Connaissance pratique de la raison ou de la métaphysique : La métaphysique est une connaissance spéculative de la raison tout à fait isolée qui s'élève complètement au-dessus des enseignements de l'expérience par de simples concepts et où la raison doit être son propre élève et donc s'y trouve continuellement dans l’embarras, même quand elle veut apercevoir a priori des lois que l'expérience la plus vulgaire confirme ou, du moins, a la prétention de confirmer (Critique de la raison pure, Préface 2°ed., p18). Pour ce qui est des objets de la raison pure, sans être donnés dans l’expérience, toutes les tentatives de les penser doivent, par conséquent fournir une excellente pierre de touche de ce que nous regardons comme un changement de méthode dans la façon de penser, c'est que nous ne connaissons a priori des choses que ce que nous y mettons nous-mêmes (Critique de la raison pure, Préface 2°ed., p19). La méthode empruntée aux physiciens consiste à rechercher les éléments de la raison pure dans ce qu'on peut confirmer ou rejeter au moyen de l'expérimentation. Or il n'y a pas d'expérience possible qui permette d'examiner quant à leurs objets les propositions de la raison pure, surtout lorsqu'elles se risquent en dehors des limites de toute expérience possible. On ne pourra donc faire cet examen que sur des concepts et des principes admis a priori, en les envisageant de telle sorte que ces mêmes objets puissent être considérés sous deux points de vues différents, d'une part comme objet de sens et de l'entendement dans l'expérience, et d'autre part comme objets que l'on ne fait que concevoir, c'est-à-dire comme des objets de la raison pure isolée et s'efforçant de s’élever au-dessus des limites de l'expérience. En effet, ne les considérant que d'un seul point de vue, la raison tombe inévitablement en conflit avec elle-même alors l’expérimentation décide en faveur de l'exactitude de cette distinction (Critique de la raison pure, Préface 2°ed., np19). Cette déduction de notre pouvoir de connaître a priori conduit au fait suivant : avec ce pouvoir nous ne pouvons dépasser les limites de l'expérience possible, ce qui pourtant est l'affaire la plus essentielle de cette science. Ce qui nous porte à sortir nécessairement des limites de l'expérience et de tous les phénomènes, c'est l'Inconditionné que la raison exige dans les choses en soi, nécessairement et à bon droit, pour tout ce qui est conditionné, afin d'achever ainsi la série des conditions. Ainsi l'Inconditionné ne doit pas se trouver dans les choses en tant que nous les connaissons, mais bien dans les choses en tant que nous ne les connaissons pas, en tant que chose en soi. De l'expérimentation de la raison pure : Cette expérimentation de la raison pure a beaucoup d'analogie avec celle que les chimistes appellent souvent essai de réduction, mais généralement procédé synthétique. L'analyse du métaphysicien sépare la connaissance a priori en deux éléments très différents, à savoir : celui des choses comme phénomènes et celui des choses en soi. La dialectique les réunit de nouveau pour faire l'accord avec l'idée rationnelle nécessaire de l'inconditionné et elle trouve que cet accord n'est jamais produit que par cette distinction, laquelle est par conséquent vraie (Critique de la raison pure, Préface 2°ed., np20). Réel : Tout ce qui forme un contexte avec une perception suivant les lois du progrès empirique est réel. Les objets de l'expérience sont réels lorsqu'ils s'accordent dans un enchaînement empirique avec ma conscience réelle, bien qu'ils ne le soient pas pour cela en eux-mêmes, c'est-à-dire en dehors de ce progrès de l'expérience. Rien ne nous est réellement donné que la perception et la progression empirique de cette perception vers d'autres perceptions possibles. 1. Les phénomènes, comme simples représentations, ne sont réels que dans la perception qui n'est, en fait, autre chose que la réalité d'une représentation empirique, c'est-à-dire un phénomène ; 2. nommer un phénomène une chose réelle avant la perception, c'est dire que le phénomène est une chose en soi : a. c'est soit signifier que dans le progrès de l'expérience, nous pourrons arriver à une telle perception ; b. c'est soit dire que cela n'a pas de signification ; c. en effet, que le phénomène existe en soi, sans relation à nos sens et à une expérience possible, on pourrait absolument le dire s'il était question d'une chose en soi ; 3. Il est question simplement d'un phénomène dans l'espace et dans le temps qui ne sont pas des déterminations de chose en soi, mais seulement de notre sensibilité : a. ce qui est en eux n'est pas quelque chose en soi ; b. ce qui est en eux ce sont des simples représentations qui, dans le cas où elles ne sont pas données en nous (dans la perception), ne se rencontrent nulle part ; 4. Le pouvoir sensible d'intuition n'est proprement qu'une réceptivité qui nous rend capable d'être affectés d'une certaine manière par des représentations ; a. les représentations dont la relation réciproque est une intuition pure de l'espace et du temps (simple forme de notre sensibilité) et, en tant qu'elles sont liés dans ce rapport (dans l'espace et dans le temps), suivant des lois de l'unité de l'expérience, s'appellent objets ; b. la cause non sensible de ces représentations nous est tout à fait inconnue ; b1. nous ne pouvons pas intuitionner la cause non sensible des représentations comme objet (object) ; b2. or un pareil objet ne devrait être représenté ni dans l'espace ni dans le temps, conditions dans lesquelles nous ne saurions concevoir aucune intuition ; c. nous appelons objet (object) transcendantal la cause simplement intelligible des phénomènes en général, mais simplement afin d'avoir quelque chose qui corresponde à la sensibilité considérée comme une réceptivité ; c1. nous pouvons lui attribuer toute l'étendue et tout l'enchaînement de nos perceptions possibles et dire qu'il est donné en soi avant toute expérience ; c2. les phénomènes, par rapport à l'objet transcendantal, ne sont pas donnés en soi ; c3. les phénomènes sont données dans cette expérience, puisqu'ils sont de simples représentations qui ne signifient un objet réel qu'en tant que perceptions, c'est-à-dire lorsque cette perception s'enchaîne avec toutes les autres suivant les règles de l'unité de l'expérience ; 5. Les choses réelles du temps passé sont donnés dans l'objet transcendantal de l'expérience ; a. les choses réelles du temps passé ne sont des objets pour nous et elles ne sont réelles dans le temps passé qu'en tant que je me représente qu'une série régressive de perceptions possibles (suivant l'histoire ou suivant la trame des causes et des effets) en vertu de lois empiriques ; b. or la série régressive de perceptions possibles n'est représentée comme réelle que dans l'enchaînement d'une expérience possible et non en soi ; c. ainsi tous les événements écoulés depuis un temps inconcevable, antérieurement à mon existence, ne signifient pas autre chose que la possibilité de prolonger la chaîne de l'expérience, en remontant de la perception présente jusqu'aux conditions qui la déterminent dans le temps ; 6. Quand je me représente tous les objets des sens, qui existent, dans tous les temps et tous les espaces, je ne les y place pas avant l'expérience ; a. cette représentation n'est autre chose que la pensée d'une expérience possible dans son intégralité absolue ; b. or, c'est dans la pensée d'une expérience possible que nous sont donnés ces objets (qui ne sont rien que de simple représentation) ; c. donc dire qu'ils existent avant toute mon expérience signifie seulement qu'ils doivent se rencontrer dans la partie de l'expérience vers laquelle il me faut tout d'abord remonter en partant de la perception ; 7. La cause empirique de la progression des objets vers l'expérience et la recherche des membres dans la régression sont pour nous transcendantal et donc nécessairement inconnu ; a. nous ne devons pas nous occuper de la cause empirique ou de la régression, mais seulement de la règle du progrès de l'expérience, dans laquelle me sont donnés les objets c'est-à-dire les phénomènes ; b. les objets possibles qui seraient données comme chose en soi et sans aucune relation à l'expérience possible en général ne sont quelque chose pour moi dans la mesure où elles ne sont que des objets, c'est-à-dire qu'autant qu'elles sont contenues dans la série de la régression empirique ; c. donc, c'est dans la relation où les phénomènes doivent servir à constituer l'idée cosmologique d'un tout absolu, et où il s'agit d'une question qui dépasse les limites d'une expérience possible que la distinction de la manière dont on admet la réalité de ces objets des sens est importante pour prévenir l'opinion trompeuse qui doit inévitablement résulter de la fausse interprétation de nos concepts d'expérience (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Dialectique transcendantale, Livre II, Ch 2, Sec 2, p376).
Règle (Regel) : C'est la représentation d'une condition générale d'après laquelle peut être posé un certains divers (donc d'une manière identique) (C.F. loi) (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Analytique transcendantale, Livre I, ch 2, p127 1° éd.).
"Les règles, en tant qu'objective s'appellent des lois" (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Analytique transcendantale, Livre I, ch 2, p141 1° éd.).
Régression : Celle-ci n'a proprement affaire qu'à la composition des parties pour constituer un tout, ou à la décomposition du tout en ses parties, et les conditions de cette partie doivent toujours être considérées comme parties de cette série, et donc, comme homogènes, par conséquent encore comme phénomènes Elle s'occupe de la manière dont un état dérive de sa cause, ou l'existence contingente de la substance de son existence nécessaire, la condition ne doit pas nécessairement constituer avec le conditionné une série empirique (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Dialectique transcendantale, Livre II, Ch 2, Sec 9.IV, p408).
Représentation (Vorstellung) : La différence qui existe entre une représentation obscure et une représentation distincte est simplement logique et ne porte pas sur le contenu (Critique de la raison pure, Théorie transcendantale des éléments, 1°partie, esthétique transcendantale, §8, p69).
Le divers des représentations peut être donné dans une intuition simplement sensible, c'est-à-dire qui n'est que réceptivité (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Analytique transcendantale, Livre I, ch 2, §15, p107 2° éd.). Action de la faculté de représentation ou de l'entendement : La liaison d'un divers en général est l'acte de la spontanéité de la faculté de représentation. Toute liaison est un acte de l'entendement auquel nous devons imposer le nom général de synthèse. La représentation de l'unité synthétique du divers rend possible le concept de la liaison (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Analytique transcendantale, Livre I, ch 2, §15, p109). Aperception et représentation : Le je pense doit pouvoir accompagner mes représentations ; car autrement serait représenté en moi quelque chose qui ne pourrait pas du tout être pensé, ce qui revient à dire ou que la représentation serait impossible ou rien pour moi (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Analytique transcendantale, Livre I, ch 2, §15, p110, 2° éd.).
Echelle graduée de la représentation :
espèce
1. Le terme générique est celui de représentation en générale (respraesentatio), dont la représentation accompagnée de conscience (perceptio) est une espèce ;
2. une perception qui se rapporte uniquement au sujet, comme modification de son état, est sensation, mais lorsqu'elle est objective elle est une connaissance (cognitio) ; or une connaissance est soit intuition, soit concept (intuitus vel conceptus) ;
3. l'intuition se rapporte immédiatement à l'objet et est singulière ;
4. le concept se rapporte médiatement à l'objet, au moyen d'un signe qui peut être commun à plusieurs choses, or le concept peut être soit empirique, soit pur ;
5. le concept pur, en tant qu'il a uniquement son origine dans l'entendement s'appelle notion ;
6. un concept tiré de notions et qui dépasse la possibilité de l'expérience est l'Idée ou concept rationnel (Critique de la raison pure, Logique transcendantale, Dialectique transcendantale, Livre I, Sec 1, p266). |
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