Introduction à la philosophie critique d'Emmanuel Kant | ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
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G : Génie (Genie): On peut définir le génie comme la faculté des Idées esthétiques, par là se trouve en même temps indiquée la raison pour laquelle c'est la nature (du sujet) et non une fin réfléchie, qui dans les productions du génie donne sa règle à l'art (de la production du beau). En effet, puisque le beau ne peut être jugé d'après des concepts, mais selon la disposition finale de l'imagination à un accord avec la faculté des concepts en général (l'entendement), ce n'est pas une règle ou un précepte qui peut servir de mesure subjective à cette finalité esthétique mais inconditionné de l'art qui doit avoir la prétention légitime de plaire à tous, mais seulement ce qui dans le sujet n'est que nature, et qui ne peut être saisi sous des règles ou des concepts, c'est-à-dire le substrat supra-sensible de toute ses facultés (qu'aucun concept de l'entendement n'atteint), donc cela même en rapport auquel c'est la fin donnée par l'Inteligible à notre nature que d'accorder toutes nos facultés de connaître. C'est seulement ainsi qu'il est possible qu'un principe subjectif et cependant universellement valable a priori se trouve au fondement de cette finalité, à laquelle on ne peut prescrire aucun principe objectif (Critique de la faculté de juger, Section II, remarque I, p167-168).
"Le génie est la disposition innée de l'esprit (ingenium) par laquelle la nature donne les règles à l'art" (Critique de la faculté de juger, Section I, livre II, §46, p138).
Or cette règle ne peut être exprimée dans une formule pour servir de précepte, elle doit donc être abstraite de l'action, c'est-à-dire du produit, par rapport auquel les autres peuvent mesurer leur talent, en faisant usage de ce produit non comme un modèle d'une imitation servile, mais comme d'un héritage exemplaire. En ce sens les modèles de l'art sont les seuls guides qui peuvent transmettre à la prospérité, c'est là ce qui ne pourrait se faire par de simples descriptions (surtout pour les arts du discours), et dans ces arts seuls parmi ces modèles peuvent devenir classiques ceux qui sont fournis par les langues anciennes, mortes et seulement conservées comme langues savantes (Critique de la faculté de juger, Section I, livre II, §47, p140).
Tout art suppose des règles sur le fondement desquelles un produit est tout d'abord représenté comme possible, si on doit l'appeler un produit artistique (Critique de la faculté de juger, Section I, livre II, §46, p138). Le concept des beaux arts ne permet pas que le jugement sur la beauté de son produit soit dérivé d'une règle quelconque, qui possède comme principe de détermination un concept, et par conséquent il ne permet pas que l'on pose au fondement un concept de la manière dont un produit est possible. Or puisque sans une règle qui le précède un produit ne peut jamais être dit un produit de l'art, il faut que la nature donne la règle à l'art dans le sujet, en d'autres termes les beaux-arts ne sont possibles que comme produits du génie (Critique de la faculté de juger, Section I, livre II, §46, p138).
1. le génie est un talent, qui consiste à produire ce dont on ne saurait donner aucune règle déterminée, il s'ensuit que l'originalité doit être sa première propriété;
2. l'absurde aussi pouvant être original, ses produits doivent en même temps être des modèles, c'est-à-dire exemplaires et par conséquent, sans avoir été eux-mêmes engendrés par l'imitation, ils doivent toutefois servir aux autres de mesures ou de règle du jugement;
3. le génie ne peut décrire lui-même ou exposer scientifiquement comment il réalise son produit, et qu'au contraire c'est en tant que nature qu'il donne la règle: il n'est pas en son pouvoir ni de concevoir à volonté ou suivant un plan de telles idées, ni de les communiquer aux autres dans des préceptes, qui les mettraient à même de réaliser des produits semblables;
4. La nature par le génie ne prescrit pas de règle à la science, mais à l'art, et que cela n'est le cas que s'il s'agit des beaux-arts (Critique de la faculté de juger, Section I, livre II, §46, p138-139).
1. il s'agit d'un talent pour l'art et non pour la science, en laquelle des règles clairement connues viennent en premier et doivent déterminer la méthode;
2. le génie, comme talent pour l'art, suppose un concept déterminé du produit en tant que fin, donc l'entendement, mais aussi une représentation (bien qu'indéterminée) de la matière, c'est-à-dire de l'intuition, pour la présentation de ce concept et par conséquent un rapport de l'imagination à l'entendement;
3. le génie montre moins dans la réalisation de la fin proposée dans la présentation d'un concept déterminé que dans l'exposé ou l'expression d'Idées esthétiques, qui contiennent pour ce projet une riche matière et par conséquent le génie fait apparaître l'imagination libérée de toute conduite par des règles et cependant comme finale pour la présentation du concept donné;
4. la finalité spontanée, sans aucune intention et subjective dans le libre accord de l'imagination avec la légalité de l'entendement, suppose une proportion et une disposition de ces facultés, que ne saurait produire aucune observation des règles de la science ou de l'imitation mécanique et que seule la nature du sujet peut engendrer (Critique de la faculté de juger, Section I, livre II, §49, p147). Ainsi le génie est l'originalité exemplaires des dons naturels d'un sujet dans le libre usage de ses facultés de connaître. Aussi le produit d'un génie n'est pas un exemple à imiter, mais un héritage exemplaire pour un autre génie, l'éveillant au sentiment de sa propre originalité et l'incitant à exercer son indépendance vis-à-vis des règles de l'art, de telle sorte que celui-ci reçoive par là même une nouvelle règle et que, ce faisant, le talent se montre exemplaire (Critique de la faculté de juger, Section I, livre II, §49, p147).
Ainsi le génie consiste proprement dans un heureux rapport, qu'aucune science ne peut enseigner et qu'aucun labeur ne permet d'acquérir; ce rapport est celui en lequel d'une part on trouve les Idées se rapportant à un concept donné et d'autre part l'expression qui leur convient, et par laquelle la disposition subjective de l'âme ainsi suscitée, comme accompagnant un concept, peut être communiquée à autrui; ce dernier talent est proprement celui que l'on nomme âme; en effet exprimer et rendre universellement communicable ce qui est indicible dans l'état d'âme lors d'une certaine représentation, que l'expression appartienne au langage, à la peinture, à la plastique, c'est là ce qui exige une faculté permettant de saisir dans sa marche rapide le jeu de l'imagination et de l'unifier dans un concept, qui peut être communiqué sans la contrainte des règles (Critique de la faculté de juger, Section I, livre II, §49, p147).
Si le génie l'emporte sur le goût, cela signifie que dans l'oeuvre d'art l'imagination l'emporte sur le jugement. Or un art, relativement à l'imagination est dit ingénieux et ne mérite d'être dit bel art qu'en rapport au jugement qui importera le plus lorsqu'il s'agira d'apprécier l'art en tant que bel art. En effet, la beauté n'exige pas si nécessairement que l'on soit riche et original dans les Idées, elle exige plutôt la conformité de l'imagination en sa liberté à la légalité de l'entendement. Car toute la richesse de l'imagination en sa liberté sans loi ne produit rien que de l'absurde, en revanche la faculté de juger est en revanche le pouvoir de l'accorder à l'entendement (Critique de la faculté de juger, Section I, livre II, §50, p148).
En effet le goût lui rogne bien les ailes, le civilise et le polit, en même temps il lui donne une direction, lui montrant en quel sens et jusqu'où il doit s'étendre pour demeurer dans les limites de la finalité, et tandis que le goût apporte clarté et ordre dans la gerbe des pensées, il donne aux Idées quelque solidité et les rend susceptibles d'un assentiment durable autant qu'universel, de servir d'exemple aux autres et d'une culture toujours en progrès. Si donc un conflit opposant ces deux qualités quelque chose doit être sacrifié dans une oeuvre, cela devrait plutôt concerner ce qu'il y a de génial; et la faculté de juger qui rend sa sentence, d'après ses propres principes, dans les choses des beaux-arts permettra plutôt qu'on porte quelque préjudice à la liberté et à la richesse de l'imagination plutôt qu'à l'entendement.
"Ainsi pour les beaux-arts l'imagination, l'entendement, l'âme et le goût sont requis" (Critique de la faculté de juger, Section I, livre II, §50, p149).
En effet apprendre n'est autre chose qu'imiter, la meilleure disposition, la plus grande facilité à apprendre (capacité) ne peut passer pour du génie. Mais pour le génie l'art s'arrête quelque part, puisqu'une limite lui est imposée au-delà de laquelle il ne peut aller, limite qu'il a d'ailleurs vraisemblablement déjà atteinte depuis longtemps et qui ne peut être reculée, en outre, l'aptitude propre au génie ne peut être communiquée et elle est donnée immédiatement à chacun en partage de la main de la nature, elle disparaît donc avec lui, jusqu'à ce que la nature confère à un autre les mêmes dons, et celui-ci n'a besoin que d'un exemple pour laisser se manifester de la même manière le talent dont il est conscient (Critique de la faculté de juger, Section I, livre II, §47, p140). Mais parce que le génie est un favori de la nature, son exemple fonde pour d'autres bons esprits une école, c'est-à-dire un enseignement méthodique suivant des règles, dans la mesure où l'on a pu les extraire des oeuvres du génie et de ce qu'elles possèdent de spécifique, pour ceux-ci l'art est dans cette mesure une imitation dont la nature a donné la règle par un génie. Mais cette imitation devient de la singerie, si l'élève imite tout, même les difformités que le génie a dû tolérer, parce qu'il ne pouvait les éliminer sans affaiblir l'Idée (Critique de la faculté de juger, Section I, livre II, §49, p147-148).
Géométrie (Geométrie):
Goût (Geschmack): Le goût est la faculté de juger d'un objet ou d'un mode de représentation, sans aucun intérêt, par une satisfaction ou une insatisfaction (Critique de la faculté de juger, Section I, Livre I, §5, p55). Goût éthique et pensée morale: "Faire preuve de goût en sa conduite (ou dans l'appréciation de celle d'autrui) est tout autre chose que manifester sa propre pensée morale, en effet celle-ci enveloppe un commandement et produit un besoin, tandis que le goût éthique ne fait que jouer avec les objets de la satisfaction sans s'attacher à l'un d'eux" (Critique de la faculté de juger, Section I, Livre I, §5, p55).
Grandeur (Grösse): C'est l'évaluation de la grandeur par des concepts numériques (ou par les signes de ceux-ci en algèbre). Nous pouvons obtenir certes des concepts déterminés de la grandeur d'une chose seulement par les nombres (en tous cas des approximations grâce à des séries numériques allant à l'infini), dont la mesure est l'unité, et en ce sens toute évaluation logique de la grandeur est mathématique. Seulement puisque la grandeur de la mesure doit être admise comme connue, si celle-ci devait être à son tour évaluée seulement par des nombres, dont l'unité devait être une autre mesure, c'est-à-dire être évaluée mathématiquement, nous ne pourrions jamais avoir une mesure première ou fondamentale, ni par conséquent aucun concept déterminé d'une grandeur donnée. Aussi bien l'évaluation de la grandeur de la mesure fondamentale peut seulement consister en ceci:
on peut la saisir immédiatement dans une intuition et en faire usage par l'imagination pour la représentation des concepts numériques; c'est dire que toute évaluation de la grandeur des objets de la nature est en fin de compte esthétique (c'est-à-dire subjectivement et non objectivement déterminé).
C'est pourquoi il n'existe pas en vérité de maximum pour l'évaluation mathématique de la grandeur (en effet, la capacité des nombres va à l'infini) (Critique de la faculté de juger, Section I, Livre II, §26, p90). De la limite de l'évaluation logique de la grandeur: On reconnaît comme objective l'impossibilité de parvenir jamais à la totalité absolue par le progrès de la mesure des choses du monde sensible dans le temps et l'espace; c'est-à-dire comme l'impossibilité de penser l'infini comme entièrement donné, et non en tant que simplement subjective, c'est-à-dire comme impuissance à le saisir, c'est qu'en ceci il ne s'agit que d'un concept numérique et qu'il n'est pas contenu compte tenu du degré de la compréhension dans un tant que mesure (Critique de la faculté de juger, Section I, livre II, §27, p98). C'est l'évaluation de la grandeur effectuée dans la simple intuition (mesurée d'un coup d'oeil). Pour l'évaluation esthétique de la grandeur il y a bien un maximum, et j'affirme de celui-ci, que lorsqu'on le considère, comme mesure absolue, par rapport à laquelle il n'est rien qui puisse être subjectivement plus grand (pour le sujet qui juge), il implique l'Idée du sublime et produit cette émotion qu'aucune évaluation mathématique de la grandeur par les nombres ne saurait susciter (sauf si cette mesure esthétique fondamentale est alors maintenue vivante dans l'imagination) ; en effet l'évaluation mathématique présente toujours seulement la grandeur relative par comparaison avec d'autres grandeurs de même espèce, tandis que l'évaluation esthétique présente la grandeur absolument, pour autant que l'esprit (Gemüt) peut la saisir dans une intuition (Critique de la faculté de juger, Section I, livre II, §26, p90). Ainsi dans une évaluation esthétique de la grandeur le concept de nombre doit être écarté ou transformé, et de ce point de vue seule est utile la compréhension de l'imagination donnant l'unité de mesure (par conséquent en faisant abstraction des concepts d'une loi de production successive des concepts de grandeur). L'appréhension ne fait aucune difficulté, car elle peut se poursuivre à l'infini; mais la compréhension progresse et elle parvient vite à son maximum, qui est la mesure fondamentale, la plus grande esthétiquement, de l'évaluation de la grandeur. En effet lorsque l'appréhension en est arrivée au point où les représentations partielles de l'intuition des sens initialement saisie commencent déjà à s'évanouir dans l'imagination, tandis que celle-ci progresse dans l'appréhension des suivantes, elle perd d'un côté autant que ce qu'elle gagne de l'autre, et il existe alors dans la compréhension un maximum que l'imagination ne peut dépasser: l'homme éprouve ici le sentiment de l'impuissance de son imagination pour présenter l'Idée d'un tout; en ceci l'imagination atteint son maximum et dans l'effort pour le dépasser, elle s'abîme en elle-même, et ce faisant est plongée dans une satisfaction émouvante (Critique de la faculté de juger, Section I, livre II, §26, p90-91).
Guerre (Krieg): |
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